Bulletins de l'Ilec

Commune, territoire, écosystème - Numéro 478

15/01/2019

Économie circulaire, synergies de zone d’activité, mais aussi gestion prévisionnelle des emplois et des compétences : parce que l’attractivité d’un territoire tient à un savoir-faire et à un savoir-être. Entretien avec Virginie Carolo, maire de Port-Jérôme-sur-Seine1, membre de la mission pluridisciplinaire Industrie dans les territoires2

Votre commune ou à votre connaissance une autre commune voisine, à l’échelle de la circonscription, a-t-elle déjà sollicité des industriels qui s’y trouvent pour s’associer à un projet d’intérêt public ou collectif quel qu’en soit le domaine (récupération de chaleur, partage de parking, gestion prévisionnelle dans le bassin d’emploi, accompagnement de PME, etc.) ?

Virginie Carolo : Nous sommes effectivement des pionniers de l’économie circulaire avec l’usine d’eau industrielle la plus importante de France, qui distribue depuis 1974 plus de 30 millions de m3 d’eau annuellement aux industriels du territoire. Plus récemment, nous avons réalisé un réseau de vapeur produite par notre usine de valorisation énergétique des déchets, avec une unité de production de bioéthanol située dans la même zone. Enfin, nous avons financé une unité qui utilise le CO2 d’une plateforme pétrochimique pour produire du gaz alimentaire.

D’une manière systématique, nous mettons en relation les grandes comme les petites entreprises du territoire, pour favoriser des filières courtes, des projets communs, des innovations au sein d’un écosystème porté par des associations d’entreprises, ou des synergies dans différentes zones d’activité. Dans un registre complémentaire mais essentiel, nous avons réalisé avec les entreprises une gestion prévisionnelle des emplois et des compétences territoriale, afin d’anticiper les besoins en recrutement et en formation.

Pour favoriser l’implantation de nouveaux acteurs industriels dans les territoires, les collectivités devraient-elles (si elles le peuvent) conduire des actions systématiques de recension des ressources mutualisables ?

V. C. : C’est évident, un diagnostic des forces et des faiblesses d’un territoire, et le partage éclairé et lucide de ce constat avec l’ensemble des acteurs du territoire est un point de démarrage incontournable. Il faut recenser le savoir-faire et le savoir-être de notre écosystème, et ensuite en faire la promotion collectivement. L’attractivité brute d’un territoire est un facteur primordial pour de futures implantations : guichet unique, réseau dynamique et exhaustif, terrains disponibles, politique volontariste en matière de formation, habitat qualitatif, mobilité adaptée, accès à la culture et aux loisirs, service public performant, etc.

La mission « Industrie dans les territoires » s’est-elle intéressée à des expériences de mutualisation territoriale de ressources entre acteurs économiques, incluant ou non les parties prenantes ?

V. C. : Nous avons pu faire un recensement des initiatives remarquables en la matière, afin de constituer aussi une base de données ou d’idées duplicables sur d’autres territoires. À ce titre, nous nous sommes intéressés à la mutualisation de ressources (secrétariat de zone d’activité, agence de développement économique, services communs, etc.), mais aussi aux déchets et au recyclage possible dans le périmètre pertinent. Force est de constater que les synergies sont présentes sur beaucoup de territoires d’industrie qui avancent, et que pour d’autres il suffit de les initier, avec l’aide des régions et des intercommunalités.

Le millefeuille administratif est-il un frein à de tels efforts de recension ?

V. C. : Oui et non. Le millefeuille permet de gérer ces questions selon la taille du territoire, le seul enjeu restant la simplification en front office, alors que le millefeuille administratif s’occupe du back-office et garantit l’appui d’acteurs institutionnels du territoire. Il s’agit bien là de faire d’une possible faiblesse une force de frappe organisée et réactive, à tous les niveaux administratifs utiles au développement de l’industrie et de l’économie en général d’un territoire.

1. Commune nouvelle issue le 1er janvier 2016 de la fusion de quatre communes de la Seine-Maritime, Port-Jérôme-sur-Seine se veut « une ville au cœur d’un territoire » (https://is.gd/Uh5Gbm).
2. Cf. programme « 124 Territoires d’industrie » https://www.economie.gouv.fr/conseil-national-industrie-2018.

Propos recueillis par J. W.-A.

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