Bulletins de l'Ilec

La « coolitude », un phénomène anglo-saxon - Numéro 386

01/12/2007

Par Vincent Leclabart, président de l’agence Australie

Comme tous les classements reposant sur les réponses à une question subjective, (« Pour vous est-ce que cette marque est cool ? »), Coolbrands est très subjectif : c’est l’expression de la sensibilité d’un groupe de personnes (des internautes) sur le côté « cool » d’une présélection de marques (pour information : cool = stylée, innovante, originale, authentique, désirable, unique). Sa valeur est donc a priori faible. Mais à la réflexion, ce classement est néanmoins intéressant, d’une part parce qu’il existe, ce qui signifie qu’un jour quelqu’un, quelque part, a décidé que ce type d’information aurait de l’intérêt et de la valeur, et d’autre part parce qu’il illustre à plusieurs titres le besoin qu’a notre société de disposer de repères pour pouvoir se situer. Les classements de marques traduisent la réussite des stratégies de communication. Ils y participent, même. Et ils sont rassurants : on peut se situer par rapport à un classement. On est d’accord ou pas d’accord, on est bien ou mal placé. Leur portée reste malgré tout limitée, puisque si une marque est forte, ce n’est pas un bon classement qui va changer les choses, rendre plus forte une marque déjà forte, et qu’à l’inverse un mauvais classement n’est pas préjudiciable. On ne s’intéresse qu’aux vainqueurs. Sauf si les mauvaises notes sont dues à des faiblesses objectives essentielles : prix, qualité, etc. Si on considère les choses un peu moins sérieusement, le classement Coolbrands est amusant et révélateur. Il est assez exotique : certes, Aston Martin est une marque mythique, mais qui de ce côté de la Manche aurait dit que c’est la plus cool des marques ? D’autres marques locales, sortes de Johnny Hallyday britanniques, apparaissent : Agent provocateur (allez voir leur site ! ), Green and Black’s. Le local n’a pas encore été laminé par le global. On y retrouve aussi des marques mondiales liées aux nouvelles technologies (mais ni Facebook ni My Space). Et il est vrai qu’aujourd’hui, c’est cet univers qui concentre toutes les attentions. La rapidité avec laquelle ces marques ont pris une place dans notre vie, les valorisations qu’elles ont atteintes étaient inimaginables il y a encore peu de temps. Le monde a vraiment changé. Outre Aston Martin, on trouve d’autres marques liées à la mécanique, Ferrari, Lamborghini, Ducati, qui sont le reflet d’une passion britannique (et masculine) pour ces sports. La tradition a vraiment du bon. Enfin, la présence de Tate Modern dans la liste montre que la culture, l’art, sont très cool outre-Manche et qu’un musée peut devenir très tendance s’il fait bien son marketing. L’art est branché, c’est rassurant. Curieusement, pas de marque de la finance. L’endroit où l’on travaille n’est pas cool, apparemment. On le sait, la notion de « coolitude » est très liée au monde anglo-saxon, à une génération jeune, à une classe aisée. D’où cette impression que Coolbrands pourrait être un sondage réalisé pour un magazine yuppie. Ne nous leurrons pas toutefois, ces supposés yuppies ne sont certes pas représentatifs de l’ensemble d’une population, mais ils incarnent l’avant-garde. Donc regardons ce qu’ils déclarent valoriser. Enfin, s’il est facile d’imaginer les marques que le sondage Coolbrands aurait fait émerger, il y a dix ans ou vingt ans, il est plus difficile de se projeter dans l’avenir. Bien sûr parce qu’il n’est pas encore inventé, mais surtout parce que tout s’accélère, l’innovation, la vie des marques, la mondialisation. Quels secteurs, quels pays seront représentés? Réponse dans deux ans, pas dans dix.

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