Bulletins de l'Ilec

Public-privé, mesure commune - Numéro 399

01/04/2009

Entretien avec Alexis Karklinz (Ernst & Young), président du comité scientifique de l’Observatoire de l’immatériel

Quand est né l’Observatoire de l’immatériel ? Alexis Karklinz : L’Observatoire de l’immatériel est né en 2006, d’une réflexion partagée par Jean-Marie Descarpentries, Alan Fustec (cabinet Goodwill Management) et Daniel Delorge, président de la société SAS (logiciels de gestion de clientèle). Tous trois constatent alors que les dirigeants ne prennent pas suffisamment en compte l’écart entre la valeur de leur société et ses éléments comptables. Cet écart s’explique, pour l’essentiel, par du capital immatériel, et la comptabilité mesure imparfaitement les actifs incorporels, et plus généralement le capital immatériel ; d’où la création d’un groupe d’experts chargé de proposer des outils pour décrire, mesurer et valoriser le capital immatériel des entreprises. Cette initiative, née en France, est très novatrice, car, hors de réflexions ébauchées en Scandinavie et aux Etats-Unis, aucune démarche n’est alors structurée. Elle s’inscrit parallèlement au rapport Lévy-Jouyet consacré à l’économie de l’immatériel. Le cabinet Ernst & Young a ajouté son expertise en matière d’évaluation financière et de conseil, et Mar-Tech & Finance a été sollicité pour sa proximité avec les jeunes entreprises dont l’essentiel de la valeur est immatérielle. Quelle est l’organisation et la vocation de l’Observatoire ? A. K. : D’abord groupe de travail, l’Observatoire de l’immatériel est devenu une association, qui s’est enrichie de membres comme l’INPI (Institut national de la propriété industrielle) et qui se réunit une fois par mois. L’Observatoire a deux axes de travail. Le premier porte sur la création d’un outil de diagnostic, accessible en ligne sur le site www.observatoire-immateriel.com et régulièrement enrichi. Il permet à l’entreprise de se noter soi-même, de manière totalement confidentielle, dans les grandes catégories d’actifs immatériels, avec des critères précis. Ainsi, pour le capital marque, nous proposons quelque cent soixante-dix critères d’analyse et de mesure. A ce jour, une centaine d’entreprises travaillent régulièrement sur leurs grilles. Le secteur des services de tourisme et de transports ainsi que la fonction finance sont les premiers utilisateurs du référentiel. Le deuxième axe de travail de l’Observatoire consiste à organiser tous les ans, depuis 2007, la « journée nationale des actifs immatériels », une journée de formation et d’information. De quoi le capital immatériel est-il constitué ? A. K. : Il est constitué de neuf catégories d’actifs : capital de clientèle, capital de marques, capital organisationnel, capital de systèmes d’information, capital environnemental et sociétal, capital de fournisseurs-partenaires, capital technologique, capital humain, capital d’actionnaires. La finalité est de valoriser les actifs, comme levier pour générer plus de revenu et plus de résultat. L’Observatoire s’intéresse-t-il au patrimoine immatériel public ? Avez-vous des contacts avec l’Agence du patrimoine immatériel de l’Etat ? A. K. : Au nombre des membres de l’Observatoire, nous comptons l’INPI, qui, par son statut parapublic, nous donne un éclairage gouvernemental. Nous sommes également en contact avec l’Apie et nous travaillons de manière parallèle. Nous n’avons pas de rôle particulier au sein de l’Apie, mais certains établissements publics ont téléchargé notre outil de diagnostic. Des passerelles existent donc entre le public et le privé. Comment valoriser le patrimoine de l’Etat ? A. K. : Valoriser veux dire : « combien cela vaut ? » et « comment générer des revenus ? ». L’Observatoire s’intéresse pour l’instant à la deuxième question, et il n’y a pas de différence entre le capital immatériel public et le capital immatériel privé. Aujourd’hui, la marque « le Louvre » a une reconnaissance mondiale et des pays acceptent de payer des redevances pour l’utiliser. Idem dans le privé qui donne ses marques en licence. En quoi l’économie de l’immatériel constitue-t-elle un enjeu majeur pour notre économie ? A. K. : Dans une économie mondialisée et hyperconcurentielle, la seule façon de créer de la richesse et de la croissance est la différenciation par les marques, la technologie, la gestion de la clientèle, l’efficacité organisationnelle. Dans tous les cas, il s’agit de capital immatériel, première source de différenciation.

Propos recueillis par J. W.-A.

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