Bulletins de l'Ilec

Nouveau paradigme pour mégachocs - Numéro 422

01/09/2011

Entretien avec Patrick Lagadec, directeur de recherche à l’Ecole polytechnique1

Le risque majeur existe. Il se joue des frontières, des barrières de sécurité et du temps. Rien n’est plus sous contrôle. Et la fin du risque zéro appelle un nouveau mode de gouvernement adapté à des terrae incognitae. Entretien avec Patrick Lagadec, directeur de recherche à l’Ecole polytechnique1 Quand est apparu le premier « risque technologique majeur » ? Patrick Lagadec : L’expression « risque technologique majeur », que j’ai introduite en 1979 en reprenant une notion tout juste utilisée par les Britanniques – major hazard –, avait fonction de signaler que nous passions un cap en matière de risques technologiques. Jusqu’alors, l’image habituelle était celle du directeur d’usine, seul maître à bord après Dieu, qui faisait son affaire de dangers liés à ses chaudières et autres installations, sur son site, délimité par des enceintes séparant clairement l’intérieur et l’extérieur. Les accidents de Feyzin (1966), de Flixborough (1974, nord-est de Londres, 95 % des habitations touchées dans un rayon de 3 km), de Seveso (1976), de Three Mile Island (1979), avaient montré que les effets des explosions et autres fuites pouvaient passer les enceintes industrielles. Des changements d’échelle considérables étaient à envisager en matière de risques industriels. Davantage : dès l’instant où les risques se jouaient des délimitations de propriété, l’extérieur était fondé à exiger de l’information, à peser sur les décisions. Mexico (1984), Bhopal (1984), Tchernobyl (1986) – même les « enceintes nationales », même les « rideaux de fer » n’étaient plus pertinents –, ne firent que consolider ce type de questionnement. Mais dire que l’on franchit un cap ne signifie pas que l’on est en présence d’une percée inédite dans toutes les dimensions, qu’il n’y a jamais eu de franchissement de seuil auparavant dans l’histoire. On ne peut pas oublier les grands accidents de mines, naufrages, incendies urbains, les grandes épidémies, etc. De bons esprits pourraient faire remarquer que l’invention du feu a constitué le tournant décisif en termes de risques. En quoi les menaces seraient-elles nouvelles par rapport aux grands risques – industriels, climatiques, terroristes, sanitaires… – que le monde a connus depuis la première révolution industrielle ? P. L. : La radicalité du nouveau est une notion fragile. Il me semble cependant que nous sommes en train de franchir de nouveaux seuils. C’est la première fois dans l’histoire qu’une installation spécifique est en mesure de provoquer des effets de très longue portée, dans l’espace et dans le temps, comme on l’a vu avec Tchernobyl et comme on va le voir, dans une mesure encore difficile à cerner, avec Fukushima. Mais il n’y a pas que ces potentiels spécifiques. Nous sommes aux prises avec des risques en interaction forte avec d’autres risques, en raison de la place critique des grands réseaux, totalement enchevêtrés, et placés dans des contextes de plus en plus instables, volatils, qui perdent leurs ancrages, leur texture, leurs stabilisateurs, qu’il s’agisse d’environnement, de santé publique, de géostratégie ou d’économie. Ces couplages serrés, ces volatilités exacerbées, produisent des tableaux de risques pour lesquels nos théories du risque, nos pratiques de prévention comme de réparation sont dépassées. Rappelons-nous les hypothèses cardinales : des événements circonscrits, indépendants, d’un poids limité au regard des systèmes globaux où ils s’inscrivent, et d’une fréquence faible ou très faible si la gravité augmente, de façon que le produit probabilité-gravité reste dans des limites raisonnables permettant le calcul, la communication, l’acceptabilité sociale... Nous passons à des tableaux de risques qui ne s’inscrivent qu’accidentellement dans ce tableau de référence. L’objection rituelle est qu’on a déjà connu la Peste noire et qu’il n’y a pas lieu de s’inquiéter. Je réponds que la Peste noire ne peut servir de ligne Maginot à la réflexion comme à la responsabilité. Ouvrons les yeux, en lisant par exemple le dernier rapport de l’OCDE sur les mégachocs à l’ordre du jour. Three Mile Island, Tchernobyl, Fukushima… Le risque nucléaire semble croître en intensité. Est-ce le risque majeur ? P. L. : A l’évidence, il est très sérieux. Fukushima vient de montrer que lorsque les hypothèses fondamentales de conception en matière de sûreté sont débordées (par un tsunami ou autre combinaison de phénomènes), lorsque les anticipations nécessaires n’ont pas été intégrées, les préparations à la surprise majeure insuffisantes ou inexistantes, la robustesse et l’indépendance des autorités de sûreté sujettes à caution, le sérieux en matière d’information plus que limité, on est sur une pente très problématique, avec des résultats qui peuvent être d’un coût humain, économique et sociétal colossal. Cela posé, on ne peut dire que ce soit le seul risque majeur. Une panne électrique, combiné à une perte d’internet, à l’échelle continentale et sur une période significative, aurait des effets, de nature différente, particulièrement délétères. Nul n’a la carte : les déstructurations majeures peuvent être aussi sérieuses dans leurs effets que les destructions majeures. Et les scénarios sont légion. Nos cartes traditionnelles des scénarios d’accidents, qui inspirent nos plans d’intervention, ne restent valables que pour une petite partie de nos vulnérabilités. Au risque technologique majeur s’ajoutent, depuis la fin des années 1990, des crises que vous qualifiez de « hors cadres », non conventionnelles. Quelles sont les nouvelles grandes lignes de faille ? P. L. : Comme je viens de l’esquisser, le tableau des risques a désormais au moins deux dimensions : d’une part des risques spécifiques, d’autre part des contextes globaux, des socles environnementaux, des textures technologiques, économiques, humaines, qui perdent leur consistance. Et les deux se mettent en résonance rapide et chaotique. Le tableau des risques doit interroger d’autres dimensions, comme celles qui suivent. La gravité intrinsèque d’un événement : Katrina détruit un territoire vaste comme la Grande-Bretagne… L’hypercomplexité des dynamiques mises en œuvre : Katrina, c’est la perte des réseaux vitaux en moins de trois heures, une trentaine d’accidents dans des installations de type Seveso, une inondation de longue durée, une sécurité publique dégradée, etc. La vitesse, éventuellement foudroyante, de la propagation des effets par les réseaux : le virus voyage par jet ; les effets dominos informatiques se déploient en minutes, en secondes, voire en millisecondes, comme à Wall Street le 5 mai 2010 ; les dynamiques informationnelles (chaînes d’information, réseaux sociaux) s’inscrivent dans l’instantanéité, à l’échelle du globe. L’ignorance, et non plus l’incertitude : elle touche l’expertise, aux prises avec des phénomènes hors domaine délimité. Le caractère impensable de ce tableau de risques : nos paradigmes habituels sont plus configurés pour des environnements délimités, stables, avec de l’incertitude seulement à la marge. Lorsque toutes ces dimensions se combinent, et que s’ajoute la perte de texture, on a à traiter une réalité qui échappe à l’entendement conventionnel. Nous sommes confrontés à un problème structurel. Pendant des décennies, le modèle d’excellence a consisté à supprimer les capacités tampons, à tout mettre en flux tendu, à pousser les interdépendances. Dès lors, le choc spécifique majeur rencontre un terrain ouvert aux épidémies foudroyantes, dans tous les domaines. C’est l’exemple des hypermarchés, qui donnent une sécurité d’une demi-journée en matière d’approvisionnement alimentaire : cela suffit à condition qu’il n’y ait aucun problème électrique, d’internet, de transport, de santé ou de sécurité publique, aucune défiance du client ni rupture bancaire, etc. La difficulté est que nous n’avons pas l’intelligence de ce retour à l’état sauvage de nos risques. Dans son histoire de la maîtrise du risque, Against the Gods2, Peter Bernstein rappelle la logique naturelle de référence : « Les meilleures décisions sont fondées sur la quantification et les nombres, déterminés par les modèles du passé. » Mais il met en garde : « Discontinuités, irrégularités, volatilités semblent proliférer, plutôt que diminuer. » Et le dernier chapitre de son livre est intitulé « Back to wilderness ». Nous préférons en rester à nos vieilles lectures : un monde tout de même bien raisonnable, le retour à l’équilibre après une difficulté épisodique. Si d’aventure l’anormal surgit, un cri du cœur instinctif s’entend dans tous les pays : « C’était exceptionnel, personne n’aurait pu imaginer une telle situation ! » En d’autres termes, « vous ne pouvez pas nous demander de faire œuvre de science, de responsabilité sur ces territoires hors convention ». Hélas, la réalité ne nous laisse plus cette échappatoire : ces terrae incognitae sont désormais notre théâtre d’opérations et notre domaine de responsabilité stratégique. Notre culture de la crise et du risque aurait-elle une guerre de retard ? P. L. : Un des membres de la cellule de crise auprès du Cabinet Office à Londres me disait un jour : « En 1914, nous avons été pris totalement au dépourvu ; en 1940, nous étions totalement préparés… à la Guerre de 14. » Marc Bloch disait en substance, à propos de la débâcle de 1940 : ils ne voulaient pas penser cette guerre, ils ne pouvaient donc que la perdre. Au moment où il faudrait franchir les seuils, ouvrir les paradigmes, souvent la frilosité prévaut face à toute interrogation. On observe une demande frénétique d’outils conventionnels pour rassurer, et plus encore : un pacte de non-ouverture de ces questions. Qui insiste le fait vite à ses dépens. En 2001, lors d’une réunion de préfets en zone de défense, comme je tentais de clarifier les enjeux des risques, je fus réduit au silence par un haut fonctionnaire de Défense : « Moi, je suis optimiste ! Les choses sont sous contrôle en France, et je ne laisserai pas ce discours se poursuivre plus longtemps. » Au cocktail, ce fonctionnaire vint me dire, en chuchotant : « Vous avez raison, mais on ne peut pas laisser dire des choses pareilles devant des préfets! ». La question n’est pas d’inquiéter, il s’agit de lucidité, d’intelligence, de responsabilité. On a l’impression que tout énoncé non conforme pétrifie, ce qui révèle une fragilité de pilotage problématique. « Il ne faut pas inquiéter les dirigeants » est un propos trop souvent entendu. L’ironie est que l’impréparation, qui pénalise fortement lorsqu’on se trouve devant un risque non conventionnel de haute intensité, peut pénaliser tout autant lorsqu’il s’agit d’une situation non conventionnelle de faible intensité. Témoin l’affaire du H1N1 : elle était si opposée à ce qui avait été préparé qu’on ne sut opérer les adaptations exigées. On refusa d’ouvrir les réflexions stratégiques nécessaires pour un pilotage adapté. Comme à Roland-Garros un amorti pervers eut raison de la fiabilité de nos systèmes de réplique. La grippe se faisait disciple de Sun Tsu : « Attaquer la stratégie de l’ennemi, et il suffit alors de deux gardes-champêtres pour s’emparer du pays. » Face au risque technologique majeur, qui des industriels, des experts, des pouvoirs publics, des organisations professionnelles et des citoyens sont les plus attachés à une vision traditionnelle du progrès, négligente des risques ? P. L. : Nous baignons dans une culture classique consistant à repérer des régularités, à mettre en place ce qu’il faut pour les contenir, puis à ériger en norme ces solutions particulières. Ce cadrage est vécu comme rassurant. Nous sommes friands de ces réassurances, auxquelles nous finissons par adhérer, même sur socle de défiance effective. Et personne n’est à l’abri. Je l’ai constaté lors d’une conférence réunissant des chercheurs américains et européens en 2003. La norme était de rappeler les résultats consacrés des études sociologiques et autres en matière de risques. « Il n’y a rien de nouveau sous le soleil » est le propos liminaire d’une communication recherchant le succès auprès des pairs. Hors séance, il n’était pourtant question que des milliers de morts en France du fait de la canicule. Après le colloque, beaucoup se trouvèrent piégés par le blackout qui toucha l’est du continent américain. L’important était que tels scénarios n’aient pas été évoqués lors des séances de travail ! La question qui nous est posée est celle d’une nouvelle liberté par rapport à ce schéma défensif de plus en plus dangereux. Et les premiers à devoir faire montre de lucidité, d’exigence de questionnement, d’innovation stratégique et opérationnelle, sont bien les dirigeants, les responsables chargés des risques et des crises, et ceux qui font profession d’y travailler. Il semble que l’on se décharge de ce fardeau de lucidité sur des communicants, priés de trouver les bons éléments de langage qui permettront de passer l’épreuve du 20-heures. Identifiez-vous des forces organisées qui concourent à la politique de l’autruche (comme outre-Atlantique les « Tea Party » et leur volonté de supprimer l’Agence de l’environnement) ? P. L. : Effectivement, certains sont meilleurs que d’autres dans l’aveuglement suicidaire, mais ils n’ont pas de monopole. Sur combien de dossier n’assiste-t-on pas à des coalitions d’intérêts et de peurs paralysantes pour refuser tout examen sérieux ! Le plus préoccupant n’est pas que des forces organisées soient actives dans ce registre, mais que nos cultures, nos préparations, nos consensus instinctifs, conduisent à rejeter le questionnement, à imposer des tactiques dépourvues d’intelligence stratégique. C’est compréhensible : qui excelle dans le connu, qui a ses leviers d’influence dans le conventionnel, a beaucoup de difficulté à s’aventurer en terra incognita. Il va falloir des trésors de pédagogie et de volonté pour que les anxiétés dues à la nouvelle donne sur les risques et les crises ne provoquent pas ces replis instinctifs. Il va nous falloir beaucoup de force, de créativité, d’ouverture, pour traverser les turbulences qui s’annoncent sur tous les fronts. Au lieu de mobiliser communicants et avocats, il serait plus heureux de mobiliser l’intelligence et l’inventivité. Le risque, sinon, est de connaître de graves décrochages de crédit et de confiance. Et de tomber – sur tous les fronts – dans l’ornière que la commission présidentielle d’enquête avait pointée après l’accident de Three Mile Island : « Nous sommes convaincus que, si les exploitants et les autorités de sûreté n’entreprennent pas de transformations, ils finiront par détruire totalement la confiance du public, et ce seront bien eux les responsables de l’élimination de l’énergie nucléaire comme source viable d’énergie. » Bien des dossiers récents, en matière de santé publique ou d’environnement, tombent sous le même jugement. La sécurité acquise grâce à la science (outil mathématique…) et à l’évolution des techniques de protection et de prévention ne serait-elle qu’apparence ? P. L. : D’énormes progrès ont été faits en matière de sécurité. Cela se traduit dans d’innombrables statistiques montrant un niveau inégalé de maîtrise des risques. Il faut conserver ces compétences, et les développer. C’est déjà un lourd défi. Mais cela n’épuise pas la question. L’époque précédente a su innover en matière de sécurité. Notre responsabilité n’est pas seulement de conserver les acquis mais de faire montre de la même inventivité pour réaliser les sauts qualitatifs indispensables. Comment conjurer l’imprédictibilité de toute crise et réduire le risque de vulnérabilité ? Ne doit-on pas apprendre à « être surpris » pour anticiper les « cygnes noirs »? P. L. : Il y a deux exigences : apprendre à être surpris, ce qui est très éloigné d’apprendre à mobiliser très vite les outils ad hoc ; apprendre à être créatif, personnellement et collectivement, en terrain inconnu. Il ne s’agit plus seulement d’avoir les bonnes analyses des risques, les bons plans, les bons exercices de validation. Nous devons préparer les uns et les autres à travailler sur feuille blanche, en environnement mutant, sur hypothèse surprenante, etc. La surprise, paramètre de base, ne doit plus provoquer tétanisation, bunkérisation, capitulation – « We must not leap from denial to despair », dit Al Gore. La surprise doit déclencher au contraire des capacités immédiatement mobilisables de reconfiguration des images mentales, des cartographies, des grammaires, des outils. Elle doit ouvrir des espaces de partage avec des gens qu’on ne connaît pas, sur des enjeux qu’on ne connaît pas, pour tracer des voies, des futurs qui ne sont pas déjà dans les cartons. C’est globalement une exigence d’inversion de logique, d’approche, de savoir-faire, qui ne vient pas se substituer mais s’ajouter aux logiques d’excellence habituelles. Hélas, ce type de perspective reste du domaine du prototype, considéré par de rares organisations d’avant-garde. Le point critique est la volonté des exécutifs de s’engager sur ces voies. L’habitude veut qu’on attende des échecs cinglants et vitaux pour aller de l’avant. ll est nécessaire de rompre avec l’habitude. Les progrès décisifs sont possibles. Ainsi de ce qu’avec Xavier Guilhou nous avons nommé « forces de réflexion rapide », des groupes de personnes venant d’horizons divers, capables de réfléchir sur feuille blanche, de proposer des innovations fortes et qui fassent sens. Cette avancée a prouvé son intérêt décisif dans des situations de grande opacité. Il ne reste qu’à passer du prototype confirmé au développement résolu. Devrait-on organiser les « journées du risque », pour apprendre à anticiper le pire et créer une nouvelle chaîne de la responsabilité ? P. L. : Il s’agit moins d’anticiper le pire que de se préparer au plus surprenant, au plus insaisissable. Encore une fois : les pertes peuvent être énormes avec une grippe qui n’est pas la variole, avec un volcan dont les risques ne sont pas ceux d’un volcan ayant posé des problèmes sérieux par le passé, mais auquel sont associées des images mentales piégées. Il ne s’agit pas de voir noir, il s’agit de voir autrement, de se montrer à la hauteur de notre civilisation scientifique. Le scientifique ne répugne pas à travailler sur et dans l’inconnu, il ne se contente pas de répliquer le connu, et d’interdire le questionnement pour la simple raison qu’il ne saurait le tolérer. Thomas Kuhn a d’admirables pages sur la découverte scientifique. Nous avons besoin de découvreurs, pas seulement d’enlumineurs attentifs à citer, orner, rassurer et reproduire comme il convient. Cela doit bien sûr se déployer à l’échelle internationale. Nous l’avons engagé à Washington, sous l’égide du Centre des relations transatlantiques (SAIS, Johns Hopkins), avec des responsables – publics, privés, ONG – des deux rives de l’Atlantique. La règle du jeu était claire : « Nous ne vous avons pas réunis pour que chacun expose ses meilleures pratiques dans les questions connues, mais pour travailler des situations hors cadre ; toute situation pour laquelle l’un d’entre vous a déjà la réponse est immédiatement mise de côté. » Avec ces règles du jeu, les échanges furent passionnants. Il y a un précédent très intéressant : ce que de grands esprits réussirent à construire en santé publique, aux Etats-Unis, peu avant la Première Guerre mondiale. Ces savants comprirent que le pays avait une guerre de retard dans la préparation aux grands enjeux de santé. Mais le changement de perspective était trop insupportable pour le plus grand nombre, à commencer par les universités, assises sur leur prestige. Ils se résolurent à créer une nouvelle université : Johns Hopkins, à Baltimore. Et, comme le dit John Barry dans son ouvrage sur la pandémie de 1918, The Great Influenza, « ils créèrent un système capable de produire des personnalités capables de penser de façon nouvelle, capables de mettre en question l’ordre habituel ». Nous avons un besoin vital de ce type de projet, en matière tant scientifique que de gouvernance. Propos recueillis par Jean Watin-Augouard 1. Docteur d’Etat en science politique, Patrick Lagadec (www.patricklagadec.net) est aussi membre de l’Académie des technologies, du Conseil supérieur de la formation et de la recherche stratégiques. Il est le cofondateur de l’European Crisis Management Academy, et l’auteur du Risque technologique majeur (1981), de la Civilisation du risque (1981) et de la Fin du risque zéro (2002, avec Xavier Guilhou). 2. Trad. : Plus forts que les dieux – la remarquable histoire du risque, Flammarion, 1998.

Jean Watin-Augouard

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