Bulletins de l'Ilec

Pondérations croisées - Numéro 443

01/06/2014

Les seniors pèsent moins que leurs cadets dans les produits de grande consommation, mais dans leur budget les PGC pèsent plus. Entretien avec Gaelle Le Floch, Strategic Insight Director, et Muriel Raffatin, Marketing Director, Kantar Worldpanel

Quels sont les seuils d’âges qui comptent pour les produits de grande consommation (PGC) ?

Gaelle Le Floch : Le seuil est une combinaison entre les familles avec enfants, sans enfants et l’âge du chef de famille. Le facteur le plus discriminant pour décrire la consommation de PGC reste le fait d’avoir ou non des enfants1.

La consommation en PGC des plus de 60 ans est-elle surpondérée par rapport à leur poids dans la population ?

G. Le F. : Non, car ce sont en grande majorité de petits foyers, avec des besoins quantitatifs plus réduits que ceux des familles comptant un nombre plus importants de bouches à nourrir. Les 60 ans et plus représentent 35,2 % de la population, mais seulement 30,3 % des dépenses en PGC. En revanche, ils sont de plus gros consommateurs de produits frais traditionnels. Ils représentent une génération qui est née avec ces produits et qui sait les préparer, car elle possède le savoir-faire culinaire et en connaît les bénéfices sanitaires. Dans la période 2012-2013, seuls les 50 ans et plus ont maintenu ou augmenté leur consommation, mesurée en nombres d’articles de grande consommation, alors que les autres catégories d’âges ont réduit la leur en volume.

Parmi les produits du quotidien, quels besoins des consommateurs âgés seraient encore à pourvoir dans l’offre de la grande distribution ?

G. Le F. : L’offre de la distribution est très axée sur les familles, car les besoins sont plus importants parmi ces foyers, et quantitativement plus intéressants pour les grandes enseignes. Il y a encore beaucoup à faire pour adapter les produits aux seniors, en termes de positionnement, pour se caler sur leurs exigences de qualité, de diététique, de recettes, de produits sains, de produits « sans ». Mais aussi en termes de visibilité dans les linéaires, de visibilité des mentions sur emballage…

La sous-consommation des seniors (par rapport à leur épargne) est-elle très différenciée selon les marchés ?

G. Le F. : Le poste de l’alimentation a un poids plus important chez les seniors, comparé à ce qu’il est pour le reste de la population. Selon les données Insee, il pèse 18 % du budget chez les 60-75 ans et presque 20 % chez les 75 ans et plus, au détriment de l’habillement, des transports, des communications et de l’hôtellerie. Les dépenses au titre de l’autonomie et de la santé vont-elles comprimer de plus en plus celles consacrées au panier de la ménagère ? G. Le F. : Plus on vieillit, et plus les dépenses consacrées à la santé sont élevées, et cette tendance s’accentue. En 2015, les seniors1 assureront la majorité des dépenses : 64 % (santé), 60 % (alimentation), 58 % (équipement), 57 % (loisirs), 56 % (assurances) (sources Credoc).

Les freins à l’achat en ligne sont-ils dus surtout à l’âge ou à la génération ?

Muriel Raffatin : L’effet de génération est certain, quand il s’agit non pas d’acquis mais de l’apprentissage de technologies pas évidentes à maîtriser. Du coup, les différences sociodémographiques affectent beaucoup plus les comportements sur Internet, parmi les 60 ans et plus, que parmi les générations plus jeunes. Soixante pour cent des plus de 60 ans sont des internautes et 32 % ont fait un achat en ligne au cours de l’année écoulée, mais chez les CSP plus de plus de 60 ans, la proportion de cyberacheteurs est de 50%.

Si aujourd’hui, parmi les 40-50 ans, 72% des internautes ont fait au moins un achat en ligne au cours de l’année, il y a peu de raisons d’imaginer pour eux dans vingt ans un net recul de ce pourcentage. Certains freins à l’achat en ligne existent, mais ils sont de moins en moins partagés par les plus jeunes générations : si seulement un quart des internautes de 60 ans et plus pensent que les paiements sur Internet sont bien sécurisés, parmi les 40-50 ans la proportion s’élève à 35 % .

Cependant, on pourrait croire à un effet d’âge. Si l’un des catalyseurs des achats sur Internet est affaire de temps et de facilité, il faut prendre en considération le fait que les plus de 60 ans retraités ne sont plus confrontés à une complexe gestion du temps. Quarante pour cent des cyberacheteurs considèrent que l’achat en ligne leur facilite la vie de tous les jours, mais ce jugement n’est porté que par 18 % des internautes de plus de 60 ans. Je pense que dans les prochaines années la structure du cyberpanier des 60 ans et plus différera de celui des générations plus jeunes, mais pas le nombre d’acheteurs en ligne.

1. Dans l’étude visée (Comment consomment les seniors ? décembre 2012, p. 11), le Credoc parle des « seniors » de plus de 50 ans (NDLR).

Propos recueillis par J. W.-A

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