Bulletins de l'Ilec

Entretien professionnel, le nouveau du Code - Numéro 455

01/03/2016

Faire le point du parcours de chacun en entreprise tous les deux ans : première échéance légale, le 7 mars, d’une innovation un peu formaliste.

Loi 2014-288 du 5 mars 2014 relative à la formation professionnelle, à l’emploi et à la démocratie sociale a introduit dans le droit français (article L. 6315-1 du Code du travail) l’obligation d’un entretien professionnel (EP) dont l’application n’est pas sans susciter encore des interrogations parmi les responsables des ressources humaines des entreprises.

Sur le papier, cette obligation, imaginée dans le cadre de la réforme de la formation continue, devait être proposée à tous les salariés français avant le 7 mars 2016 ; à défaut, les entreprises seront sanctionnées (à hauteur de 3 000 euros par salarié). La majorité des salariés n’en ont peut-être encore pas entendu parler : ils étaient 60 % dans ce cas selon l’Ifop en octobre dernier.

L’entretien aborde de façon spécifique le projet professionnel. Il fait l’objet d’une invitation, d’un temps d’échange et d’un compte-rendu particulier par écrit, qui doit être signé par les deux parties. La traçabilité des entretiens est essentielle, afin que tout contentieux soit évité. Il peut se dérouler à la suite de l’entretien annuel ou distinctement. Le salarié peut toutefois refuser de se prêter à l’exercice, mais si telle est sa décision il doit la signifier par écrit.

Reconduit tous les deux ans, l’entretien professionnel est aussi l’occasion, tous les six ans, d’un bilan qui est un « état des lieux récapitulatif du parcours professionnel du salarié ». Le salarié doit pouvoir tirer un bénéfice de ces entretiens, et d’au moins deux des trois mesures suivantes : suivi d’une formation ; acquisition des éléments de certification par la formation ou par la validation des acquis de l’expérience (VAE) ; progression professionnelle ou salariale.

En pratique, les DRH sont nombreux à s’interroger sur l’ambiguïté d’un entretien conduit éventuellement par eux ou par le manager (génériquement désignés comme « employeur » dans le texte), mais dans une position de non-manager (hors considération de sa position hiérarchique de « N + n »). Il ne s’agit pas en effet de distribuer les bons ou les mauvais points (« Cet entretien ne porte pas sur l’évaluation du travail du salarié », dit la loi), mais de permettre au salarié de s’exprimer librement sur ses attentes et sur ses déceptions.

L’entretien est centré sur l’évolution professionnelle, laquelle peut se traduire par un changement de niveau, d’échelon ou de coefficient dans la grille conventionnelle de classification en vigueur dans l’entreprise.

Les actions de formation ou de développement des compétences qui auront été retenues à l’issue de l’entretien ne sont pas nécessairement réalisées pendant le temps de travail.

Pour les directeurs des ressources humaines, cet entretien professionnel peut à maints égards être une opportunité, en particulier s’il est conduit en résonance avec la gestion prévisionnelle de l’emploi et des compétences (GPEC) de l’entreprise, mais beaucoup préféreraient qu’il ne soit pas une contrainte. Surtout dans les PME, même si elles n’ont pas de DRH pour approfondir la question. Et l’on peut se demander si l’EP ne risque pas de polariser les recherches d’« évolution » et les moyens de la formation professionnelle sur la seule évolution interne, au détriment de la mobilité interentreprises ou interprofessionnelle que les moyens de la formation sont censés favoriser.

Évangéline Baeyens

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