Bulletins de l'Ilec

Incitation bien comprise - Numéro 456

01/04/2016

Atteindre les objectifs de recyclage suppose que qu’ils soient au cœur des stratégies d’entreprise et non une hypothèque sur leurs résultats. Entretien avec Benoist Berton, directeur des affaires publiques de Coca-Cola Entreprise

Ce qui se dessine pour le cahier des charges des éco-organismes vous paraît-il satisfaisant ?

Benoîst Berton : Nous avons eu communication par l’administration, fin mars, d’une première version du cahier des charges. Dans l’état actuel du débat, la partie économique de ce cahier des charges est difficilement lisible et les montants qui y figurent ne nous conviennent pas. Les coûts de référence présentés sont élevés et ne correspondent pas à un système optimisé. La connaissance des coûts a disparu, or c’est un élément indispensable pour objectiver les débats. Les aides à l’investissement viennent en plus des soutiens à la tonne, ce qui revient à faire payer deux fois les investissements aux metteurs en marché. Le principe de la libre entreprise liée à celui de REP ne nous semble pas non plus réaffirmé. Beaucoup d’éléments vont nécessiter une étude approfondie, et des réponses précises de l’administration. Nous nous inscrivons plus que jamais dans une logique de dialogue avec les pouvoirs publics et les collectivités.

Plus d’équité du barème amont peut-elle être attendue d’un dispositif où les metteurs en marché auraient moins de contrôle sur les éco-organismes ?

B. B. : Les entreprises de l’agro-alimentaire sont très attachées au principe de la REP, et nous souhaitons continuer d’assumer pleinement cette responsabilité. Pour être équitable, le nouveau cahier des charges doit permettre aux metteurs en marché, via leur éco-organisme, de mieux contrôler les financements engagés pour maîtriser les coûts du dispositif de collecte et de tri. En vingt ans de REP, nos entreprises ont montré leur capacité à gérer les enjeux de recyclage des emballages ménagers, dans des conditions économiques raisonnables et mieux contrôlées que ce qui figure dans le premier projet de cahier des charges. La Cour des comptes a parlé à propos du barème amont d’un « dispositif d’une grande complexité », mais elle se félicite qu’il soit devenu « plus précis et davantage tourné vers l’écoconception ».

Devait-il être repensé ?

B. B. : Le précédent barème amont avait été élaboré pour répondre aux objectifs fixés par la loi Grenelle 2 (augmentation du taux de recyclage, écoconception) et mettre en concordance le financement par les contributeurs avec le coût de collecte et de tri de chaque type d’emballages, pour être plus équitable. Le coût de collecte et de tri du plastique, du papier, du carton, de l’acier ou de l’aluminium n’est pas le même. Dans l’agro-alimentaire, il y a beaucoup de spécificités d’emballage, et parfois la volonté d’équité entraîne une complexité qui perturbe la lisibilité du barème. Pour être efficace, le barème doit être compris par les contributeurs, il doit donc être simplifié, plus transparent et en même temps servir les objectifs fixés. Des systèmes de bonus-malus pertinents et intelligents ont été mis en place et sont bien acceptés ; il faut continuer dans ce sens, car cela stimule les comportements vertueux. Le nouveau barème devra aussi mieux prendre en compte les attentes des metteurs en marché en matière d’économie circulaire et de développement du recyclage, des enjeux stratégiques pour notre secteur.

Quel effet aurait une augmentation des contributions amont sur les coûts et les marges des entreprises ?

B. B. : Les équilibres financiers des entreprises de l’industrie alimentaire sont dans une situation très fragile. Dans l’environnement incertain qui est le nôtre, sur fond de crise de la consommation, de baisse du pouvoir d’achat, de pression fiscale sans précédent, de tension commerciale, toute augmentation des coûts pourrait être préjudiciable. Une augmentation radicale ne serait pas justifiée. Notre secteur sera très vigilant quant au maintien d’une contribution au juste prix, corrélée à un dispositif de collecte et de tri optimisé répondant aux objectifs de développement du recyclage des emballages : extension des consignes de tri du plastique, taux de recyclage de 75 %, développement de la collecte et du recyclage dans le hors-foyer. Le cahier des charges doit prendre en compte les intérêts de l’ensemble des parties, dont les metteurs en marché.

Propos recueillis par J. W.-A. —

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