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Vico, le roi du lâcher-prise

16/07/2016

Disposant d’une notoriété forte, mais perçue comme peu innovante et vieillissante, Vico s’offre pour ses soixante ans une cure de jouvence, afin de conforter son rang dans un marché porteur.

Par Jean Watin-Augouard

Quel est le roi des supporters à domicile ? Vico, bien sûr ! le roi de tous les supporters d’événements sportifs, qui en 2016 seront particulièrement rivés devant leur télévision à l’occasion de l’Euro – qui se déroulera en France du 10 juin au 10 juillet (1) – et des Jeux olympiques d’été – au Brésil. 62 % des Français déclarent qu’ils suivront l’Euro (2). Une aubaine quand 47 % des moins de vingt-cinq ans consomment des produits apéritifs pendant un match, devant leur petit écran. Des moments de consommation à ne pas manquer pour une marque qui entend conforter et consolider sa place de première marque de produits apéritifs salés et de pause apéritive. Aussi, à tous les « sportifs de canapé » Vico propose-t-il – et c’est une grande première pour la marque qui n’a jamais eu recours à des ambassadeurs – deux coachs de renommée, deux grands noms du sport : l’ex-nageur Alain Bernard et l’ex-footballeur Christophe Dugarry.

Christophe Dugarry (à gauche) et Alain Bernard, deux ambassadeurs renommés

Ainsi qu’une gamme de produits apéritifs : six innovations qui témoignent du renouveau de la marque (3) ! L’opération « Partenaire des supporters à domicile » se décline sur les packagings – vingt millions de packs ! –, avec des paquets de chips aux couleurs de la France. Sur le plan digital, la plateforme vicosupporters.fr est dédiée depuis avril aux supporters, un grand jeu concours leur est proposé durant six mois, avec à la clé un vidéoprojecteur Philips et 100 kits du supporter à gagner par semaine (4). Digital encore avec la page officielle de la marque sur Facebook, sur laquelle figurent des pronostics, des quizz sportifs, des conseils de maquillage ou des idées de jeux pour s’occuper pendant la pause d’un match. Vico table sur une augmentation de la consommation de 10 % en juin, période où, indépendamment de l’Euro, les ventes de chips sont les plus élevées (5).

De nouveau… la patate

Les chiffres parlent d’eux-mêmes. Première marque en notoriété spontanée dans l’univers des PSA (produits salés apéritifs), Vico voit sa part de marché progresser davantage que celle de son secteur. Ce dynamisme s’observe également sur les principaux segments : chips, graines et snacks. « Vico est la première marque transversale en termes de chiffre d’affaires sur les chips et produits salés apéritifs (6), précise Fabien Razac, directeur du marketing. Notre stratégie est de développer Vico en marque ombrelle sur tous les segments du marché des produits salés pour apéritif et pause, chips, graines et snack. Nous souhaitons être le moteur de la croissance du marché. » Point de passage obligé : l’innovation, qui concerne aussi bien le produit que le packaging (7). « Le marché, constitué de grandes marques et de nombreux petits intervenants, est un marché d’impulsion, développé par l’offre. Les consommateurs souhaitent découvrir des nouveautés aussi bien en termes de goûts, de parfums, de textures que de formats. Ce qui conduit à la “prémiumisation” de l’offre. Le vrai challenge est de trouver la bonne innovation et de la soutenir pour qu’elle s’installe sur le marché », analyse Fabien Razac.

Un marché au sein duquel les pratiques de consommation se sont multipliées, de l’apéritif dit « classique » au repas à part entière ou apéritif dînatoire, de la pause en groupe au parc en écoutant de la musique au grignotage pendant la journée, le pique-nique. « Notre rythme de lancement de produits tourne autour de quinze à vingt produits par an, en mars-avril et à la rentrée de septembre. » Au nombre des nouveautés dans le segment des chips (8), citons la Gourmande en 2014, une chips nature relevée d’une pointe de crème et de beurre, la Kettle Cooked en 2015, une chips prémium avec un croquant unique et un goût de pomme de terre renforcé, la « chips des graaaaaaandes occasions », la relance la même année des chips aromatisées, appelées les Grill, en référence au barbecue. Pour les consommateurs qui entendent marier plaisir et santé, Vico propose toujours les chips « légères », allégées en matière grasse, en format sachet et en multipack. Sur le segment des graines, Vico propose une nouvelle gamme, les Intenses, disponible en cacahuètes, noix de cajou et un mélange cacahuètes-noix de cajou « Nous avons développé, dans notre usine de Charvieu- Chavagneux, un procédé unique de double cuisson, qui permet aux graines d’être plus croquantes, plus aromatiques et avec un côté plus torréfié. » Depuis 2015, la marque propose également les Nuts & Cracks, mélanges de cacahuètes enrobées et de biscuit soufflé aromatisé bacon et fromage. Côté snack, Crazy Craq est lancé également en 2015, pour les 15-25 ans, avec une nouvelle forme et une texture plus croustillante, aux arômes plus marqués (9). « Nous avons gagné plus d’un million de foyers acheteurs sur la Kettle Cooked, autant sur les Grill et les Crazy Craq », précise Fabien Razac. La même année, Vico entre dans un nouveau territoire avec les pâtes à tartiner Curly onctueuse et crunchy. Une révolution gustative ! 2016 s’ouvre sur de nouvelles saveurs (10).

L’esprit d’équipe

Fabien Razac

Intégré au groupe allemand Intersnack depuis 1998, auquel se joint Lorenz Snack World France (11) en 2007, Vico, fabricant à marque propre, patrimoniale, et à marque distributeur, bénéfi cie d’une expertise singulière : « Le fait d’être présent sur les deux secteurs développe notre expertise. Notre service MDD propose des innovations à la demande des distributeurs, ce qui nous permet de bien connaître le marché des PSA. Ce n’est pas le cas des autres grands intervenants du marché. » La dimension européenne du groupe est également un atout puisque « nous partageons, entre les différentes sociétés du groupe, les tendances consommateurs, les arômes de demain. C’est très stimulant. Ainsi Kettle Cooked a d’abord été testé en Allemagne en 2014 avant d’être lancé en France l’année suivante. » Autre atout et non des moindres, Intersnack est une entreprise familiale, non cotée en Bourse. « Nous ne vivons pas sous la dictature du trimestre, les actionnaires familiaux veulent transmettre à leurs petitsenfants, ils ont donc une vision à long terme. » Sur le plan de la gouvernance, « nous bénéficions d’une grande autonomie, qui nous permet d’avoir une culture d’entreprise unique, une vraie singularité dans la proximité avec les gens, le partenariat entre les services. Nous sommes très réactifs. »

Une identité française affirmée

Ainsi l’esprit coopératif fondé sur la responsabilité, la solidarité, l’esprit d’équipe, l’engagement, insuffl é par les fondateurs lors de la naissance de Vico en 1955 perdure-til (12). « Nous sommes une ETI française de 600 salariés avec deux usines, à Vic-sur-Aisne (chips et snacks) et à Charvieux- Chavagneux, en Isère (graines et mélanges). 90 % des produits vendus en France y sont fabriqués, un partenariat historique nous lie avec les agriculteurs et la filière pomme de terre de Picardie ». Sur le plan de l’approvisionnement en graines, Vico est l’un des plus gros acteurs européens et travaille en amont avec les producteurs-récolteurs d’Amérique du sud, d’Afrique et d’Asie, en partenariat avec Fair Trade.

Sur le plan des allégations nutritionnelles, une charte très stricte fixe un certain nombre de règles : sont exclus les colorants artificiels, les exhausteurs de goût, les arômes artifi ciels et l’huile de palme (13). « Nous utilisons de l’huile de tournesol, nous réduisons les acides gras saturés ainsi que les taux de sel pour répondre aux exigences des consommateurs en termes de réassurance nutritionnelle. »

Marque ombrelle et transversale

Logo et mascotte version 2010

Le savoir-faire ne peut rencontrer la demande des consommateurs sans le faire-savoir. « Il faut que tout change pour que rien ne change », annonçait le prince de Salina à son neveu Tancrède. « Si nous voulons que tout continue, il faut d’abord que tout change », lui répondait ce dernier (14). Les goûts évoluent, les usages changent, les modes de production se transforment, les produits s’adaptent. La pomme de terre, elle, demeure ! La preuve ? Depuis 1970, elle symbolise Vico, seule marque incarnée dans l’univers des produits salés pour apéritif. Certes, avec des styles – moustache (15), chapeau de paille, chapeau stetson, et, depuis 2014, houppette –, des surnoms – Monsieur Patate, Monsieur Apéro, le professeur Vico –, des postures – statique, dynamique, muette, parlante –, et des slogans – Le roi de la pomme de terre en 1979, Le roi de l’apéritif en 2011, Le lâcher prise en 2014 – différents.

Mais c’est avec ce tubercule – comestible ! – que Vico traverse le temps, surmonte les crises, retrouve « la patate », allant jusqu’à fêter ses soixante ans l’année dernière !  En 2011, l’agence Nude sort la marque de son champ de pommes de terre, elle la « dépommedeterréise » en lui donnant une nouvelle identité, afin de la placer dans un champ plus large : celui des possibles, au coeur d’un univers de l’apéritif porté par la mode des apéros dînatoires (16). Vico abandonne alors son chapeau de paille pour un stetson, évoquant l’univers des scènes de spectacle et de divertissement, tout en confirmant son accessibilité et son côté populaire. Une ellipse, par sa rondeur, appelle le plaisir, la convivialité. Une segmentation par couleur permet de mieux singulariser les références, leur aromatisation et leur donne plus de présence et de visibilité en linéaire. Le nouveau personnage accueille d’autres produits (les graines, les noix, les biscuits au riz soufflé, Curly ), car la marque Vico s’« ombrellise » pour devenir reine de l’apéritif. Avoir une marque ombrelle permet de développer la catégorie et de fi déliser les consommateurs.

La campagne « Vico Apero Show », signée Dufresne & Corrigan, accompagne ce changement. Et, pour s’inscrire dans le marketing participatif, Vico fait voter ses consommateurs en 2013 en leur faisant choisir le parfum de leur futur paquet de chips : tzatziki, chorizo, pesto et mozzarella. « Pour autant, souligne Fabien Razac, le roi de l’apéritif était un peu désuet et le territoire de l’apéritif déjà occupé par d’autres marques, ce qui ne rendait pas Vico spécifique. Aujourd’hui, notre communication porte sur le plaisir du partage, l’échange, la générosité, le lien social entre amis, en famille ». Vico choisit donc de ne plus se focaliser sur son expertise de l’apéritif pour embrasser celui de la détente. Ainsi l’appellation « chips de l’apéritif » disparaît-elle, car la marque entend focaliser sur l’appétence des parfums proposés plutôt que sur un usage spécifique.

De la « Vicothérapie » au lâcher-prise, une marque style de vie

En 2014, c’est le « lâcher-prise », une nouvelle mascotte fait son apparition

On connaissait la Cliothérapie (17), voici la Vicothérapie, destinée à relancer la marque, en 2014, sur le plan de la communication, parallèlement aux innovations (18). Rajeunissement de la marque oblige, un nouveau personnage – une marionnette créée avec l’agence de communication Change – a d’abord investi le Web – avant la télévision –, avec des films postés sur YouTube (19) – la plateforme vidéo privilégiée des jeunes – et relayés sur Facebook et Twitter, afin de les initier à la Vicothérapie. Mais qu’est-ce que la Vicothérapie ? « C’est un style de vie, celui du lâcher-prise à tout moment de la journée grâce au pouvoir et au plaisir libératoire de toute la gamme apéritive Vico », explique Fabien Razac. Un art de vivre que résume ainsi le nouveau slogan : C’est bon de se lâcher. La mascotte est présente sur l’ensemble de la gamme de produits apéritifs et de snacking d’Intersnack (20), excepté sur Curly et Monster Munch, car « le personnage peut entrer en conflit avec leur territoire ». Afin d’harmoniser la gamme, la marque Vico est désormais au centre du nouveau packaging conçu par l’agence de design Team créatif (21). « En 2014, nous avons donné la même structure de pack pour l’ensemble de la gamme chips, snacks et graines avec une notion de “corne d’abondance”, un logo plus présent et modernisé, une meilleure mise en avant des produits et des ingrédients ». L’objectif, via le Web, est de « mieux communiquer sur tous les segments de la marque, car pour la majorité des consommateurs, Vico reste une marque de chips ». Pour faire le buzz sur Twitter, la marque a lancé en 2014 une opération baptisée « Un tweet=une chips », qui a permis à ses 5 000 premiers followers de gagner chacun un paquet de chips. « Jamais une campagne d’échantillonnage de cette envergure n’avait été réalisée, souligne Fabien Razac. En 2015, nous mettons de plus en plus en avant le produit dans les publicités, car la marque est encore perçue comme manquant de goût ». Comparée aux États-Unis ou à la Grande-Bretagne, la consommation en France demeure faible, un potentiel de croissance existe donc, tant pour les chips que pour les snacks et les graines. Et demain, du frais ? « On ne s’interdit rien dans l’absolu », conclut Fabien Razac.

Vico en chiffres

  • 45 % de notoriété spontanée (+ 9 points par rapport à 2014).
  • Part de marché de 13,2 % (valeur) (+ 0,6 point par rapport à 2014), croissance de 8,1 % (marché + 2,9 % ).
  • Chips : part de marché de 15,4 % (+ 1,2 point par rapport à 2014), croissance de 13,4 % (marché + 4,7 % ).
  • Graines (dont celles vendues en fruits et légumes) : part de marché de 8,5 % (+ 0,5 point par rapport à 2014), croissance de 11,2 % de CA (marché + 5,1 % ).
  • Snacks : part de marché de 25,1 % (+ 0,8 point par rapport à 2014), croissance de 4,5 % (marché + 1,2 % ).
  • Biscuits : position marginale avec 0,6 points de part de marché.
  • Répartition dans les ventes (250 millions d’euros) : 60 % pour la marque, 40 % pour les MDD.
  • Répartition dans les ventes à marque : chips (22 % ), graines (20 % ), snack (50 % ) ; purée et croutons (6 % ).

 

(1) L’Euro n’a pas encore commencé au moment de la rédaction de cet article.
(2) Observatoire du foot PMU réalisé avec TNS Sofres.
(3) Les Intenses noix de cajou et cacahuètes, les chips Kettle Cooked, les snacks Crazy Craq, Curly format party 230 g et Munster Munch goût emmental.
(4)  Jeu disponible du 4 avril au 5 septembre 2016.
(5)  Plus d’un tiers des ventes de chips sont réalisés durant l’été.
(6)  La deuxième marque est Belin, suivie par Benenuts. En termes de groupe, Intersnack est numéro deux du marché, derrière Pepsico – Lay’s, Benenuts, 3’D – (18,6 % de part de marché en 2015) et devant Mondelez – Belin, Chipster – (7,7 % du marché). Sur le segment des chips, Lay’s est numéro un avec 40 % de part de marché.
(7)  Vico inventa le sachet aluminium en 1979, les chips à la pomme Croustipom en 1988, les chips ondulées et bien sûr la première purée en flocons 100 % pommes de terre sans conservateur ni colorant en 2003, le concept de chips Tradition d’ailleurs en 2008. Au nombre des retraits, les sticks Plumise saveur olive romarin en 2005, les Curlettes en 2008, les biscuits pour enfants en 2012.
(8)  Le marché des chips est passé de 150 M€ en 2005, à 410 M€ en 2015, le cap des 450 M€ est prévu en 2016. Entre 2008 et 2014, ce marché a crû de 5 % par an. La consommation d’un Français est passée de 400 g par an en 2004, à plus de 900 g en 2014, deux fois moins qu’un Belge, un Espagnol ou un Allemand et quatre fois moins qu’un Britannique. 37 millions d’apéritifs sont pris à domicile chaque semaine.
(9)  Cacahuète addict, Strong cheese et Spicy lovers. Slogan de la campagne TV : Crazy Craq de Vico, faites du bruit !
(10)  Trois parfums Grill en 2015 – poulet grillé, merguez grillée, chèvre chaud et fi nes herbes –, deux nouveaux parfums en 2016 – grillades aux herbes et poêlée persillée. Kettle Cooked sel de mer, vinaigre et bacon fumé en 2015, crème et oignon en 2016. Crazy Craq Barbecue maniac en 2016.
(11)  Vico hérite de Curly et d’Apérifruits, inventés par Bahlsen respectivement en 1960 et en 1982.
(12)  Vico est la contraction de Vic-sur-Aine et de « coopérative », en référence à la coopérative agricole originelle, née de la volonté d’agriculteurs picards de mutualiser les productions de pommes de terre afin de répondre à la demande des foyers français.
(13)  Excepté dans la pâte à tartiner à la cacahuète, qui utilise de l’huile de palme certifi ée durable.
(14)  Le Guépard, Giuseppe Tomasi di Lampedusa.
(15)  La mascotte portait une moustache dans le premier film publicitaire, en 1970 !
(16)  De juillet à octobre 2010, Vico a proposé le jeu Vico-Secret Story sur TF1, consistant à voter en ligne, chaque semaine, pour une vidéo « croustillante » parmi cinq extraits de l’émission Secret Story.
(17)  « On devrait tous s’offrir une Cliothérapie », campagne lancée par Publicis en 1999 pour la Clio de Renault.
(18)  Curly et Munster Munch ont leur propre plateforme publicitaire.
(19)  Vico a fait appel aux scénaristes de la minisérie à succès Nos chers voisins, à des auteurs des Guignols et à des nouveaux talents comme Kheiron, découvert dans la minisérie Bref. La marque a mis en ligne dix « pré-rolls », des petits films qui apparaissent avant une vidéo. Chacun de ces pré-rolls a été adapté aux vidéos qui font le buzz. Cette première a enregistré le record de France d’ouvertures et de lectures, avec un taux supérieur de 2,5 fois à la moyenne… soit 800 000 vues en l’espace de quatre jours.
(20) La caution Vico figure sur Vico, Vico Munster Munch, Vico Curly, Vico Apérifruits, Vico Crunchips, Vico Dixi, Vico Crousti’pom, Vico Peppi’s, les croûtons, la purée. Le popcorn Baff est le seul produit à ne pas avoir cette caution.
(21) En 2013, Team créatif avait retravaillé la mascotte en l’animant et en lui faisant changer d’expression selon les produits.

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