Vie des marques

Lactel, faire grandir l’essentiel

14/04/2023

Entre contraintes commerciales et nécessité d’adapter l’offre, un de ses acteurs majeurs œuvre pour une filière laitière durable et une réduction de l​‌’impact environnemental de son offre. Entretien avec Anne Charlès-Pinault, directrice générale de Lactel.

En quoi consiste votre projet d’entreprise RSE « Lactel l’Essentiel » ?

Anne Charlès-Pinault : Avec des objectifs et des actions concrètes nous souhaitons faire grandir la performance de Lactel de manière à la fois rentable et responsable, pour favoriser le développement et l’engagement de nos salariés, promouvoir l’équilibre alimentaire et préserver l’environnement. En ce domaine nous souhaitons contribuer à limiter le réchauffement climatique, à préserver la biodiversité (écoconception emballage, déchets…) et les ressources (eau, énergie…). Et renforcer nos partenariats avec les agriculteurs pour développer le bien-être animal, accompagner la transition des filières agricoles et contribuer au développement des territoires.

Notre projet « Faire grandir ce qui est essentiel » repose donc sur trois piliers : l’humain, la planète et le lait, pour construire une filière laitière durable. Pour chacun nous avons une feuille de route et des objectifs. Lactel a obtenu cette année l’échelon 3/4 de la norme Afnor ISO 26000. Nous en sommes fiers car seulement 2 % des entreprises en France sont labellisées à ce niveau.

Utilisez-vous la blockchain pour renforcer la traçabilité de votre chaine de création de valeur ?

A. C.-P. : Le principe de traçabilité Lactalis est performant, pour autant, il n’est pas adossé totalement sur l’approche blockchain. Des projets sont en cours au niveau du groupe pour optimiser la consolidation des informations de traçabilité depuis l’amont jusqu’à l’expédition des produits finis.

Dans quelle mesure les salariés sont-ils impliqués dans votre projet ?

A. C.-P. : Depuis le début du projet Lactel L’Essentiel en 2018, la construction s’est faite de manière collaborative. Nous avons mis en œuvre des ateliers réunissant tous les managers de l’entreprise pour définir les piliers du projet, les objectifs et les plans d’action. En 2023 nous sommes en phase de déploiement auprès de nos mille salariés, elle passera également par une phase d’ateliers pour permettre à chacun d’identifier son rôle et sa contribution.

Sites bientôt tous certifiés Iso

Quelle est la spécificité de la filière « Les 20 fermes » ?

A. C.-P. : C’est une filière créée en 2017 pour répondre conjointement à une attente des consommateur relative à l’alimentation de la vache et au bien-être animal, et de la filière agricole : valorisation des pratiques vertueuses d’élevage (bien-être animal), pâturage avec alimentation de qualité sans OGM (moins de 0,9 % ). Aujourd’hui les « 20 Fermes » regroupent quarante et un éleveurs.

Quelles sont vos ambitions pour la décarbonation dans vos usines ?

A. C.-P. : Deux de nos sites sont certifiés ISO 14001 et nous avons l’ambition de toutes les certifier d’ici la fin de l’année. De plus, des projets sont bien avancés sur les énergies renouvelables : panneaux photovoltaïques, chaudières biomasse avec un objectif de réduction de 30 % des émissions de CO2.

Et pour la circularité des emballages et le recyclage des bouteilles ?

A. C.-P. : Améliorer la circularité de nos emballages est un sujet majeur . De nombreux projets visent à économiser plus de matière vierge. La bouteille Lactel est fabriquée dans nos usines pour éviter un transport de bouteilles vides inutile. Depuis 2021, Lactel, collabore avec Ineos, pour fabriquer des bouteilles de lait en R-PEHD qui réduisent la dépendance à la ressource fossile. Concernant le film de regroupement, Lactel a été la première marque, en 2016, à en utiliser un pour ses packs, composé à 20 % de plastique recyclé. En 2021, il est passé progressivement à 50 % de matière recyclée et l’objectif pour 2025 est d’être à 100 % .

Transtion qui nécessite l’aide des consommateurs

Comment sensibilisez-vous les consommateurs aux gestes du recyclage ?

A. C.-P. : En France, seulement 59 % des bouteilles et flacons plastiques sont triés. neuf consommateurs sur dix déclarent trier mais seulement la moitié le font de manière systématique. Sensibiliser les consommateurs de lait au bon geste de tri est donc une priorité. L’ensemble de nos produits sont porteurs de la mention tri conformément à la réglementation, mais également l’ensemble de nos communications télévisées. Depuis 2019, Lactel a mis en place l’opération Recyc’lait avec l’animation de machines de tri puis de recyclage en magasin. En 2023, nous voulons rendre ce geste de tri encore plus évident, réflexe, tout en rappelant que la bouteille triée commence une seconde vie, auprès du plus grand nombre. C’est à cette occasion que nous lançons une opération avec des bouchons jaunes dans nos films de regroupement par dix au mois de mars chez Carrefour et prochainement dans d’autres enseignes. Nous avons besoin que les consommateurs nous aident à réduire l’impact environnemental de nos emballages, en plus des démarches de transition que nous mettons en œuvre. Quels que soient les changements que nous opérons, si les consignes de fin de vie ne sont pas assez respectées, l’impact positif de ces évolutions d’emballages sera limité.

Le vrac est-il envisageable ?

A. C.-P. : Le lait est une matière fragile et sensible à la lumière et à l’oxygène. La gestion du vrac doit prendre en compte la qualité et l’intégrité du lait. Aucune solution de vrac ne permet de garantir l’intégrité du lait aujourd’hui ; le règlement 853/2004 interdit la vente en vrac du lait traité thermiquement.

Pression sur la rentabilité de la filière

L’inflation et la baisse du pouvoir d’achat orientent-elles la consommation de produits laitiers à la baisse ?

A. C.-P. : Du fait de l’inflation, les consommateurs arbitrent leur panier d’achat en quantité et en fréquence. Ils diminuent leurs achats et achètent moins. La catégorie lait ne fait pas exception. Les Français en ont acheté 3,5 % de moins en 2022.

Dans quelle mesure le dispositif légal existant (Égalim) vous a-t-il aidé à répercuter vos coûts dans les prix de cession avec vos clients ?

A. C.-P. : Égalim a permis de revaloriser les matières premières agricoles au bénéfice des producteurs et de les répercuter dans les prix d’achat : le prix du lait payé aux producteurs a pu être augmenté. Mais les autres coûts, ceux des « matières premières industrielles », sont toujours un sujet de tension. Or ils doivent être pris en compte pour que soit assurée la pérennité de la filière.

Comment évoluent les prix des matières premières agricoles et industrielles ?

A. C.-P. : Aujourd’hui la valorisation est le résultat de trois facteurs : le prix du lait payé aux producteurs, la hausse des coûts production (que les distributeurs négocient, de sorte que la répercussion ne se fait pas entièrement), et le « mix », l’offre de produit visant à mieux répondre aux attentes des consommateurs. Il faut aussi pouvoir financer la transition écologique. Les distributeurs ne sont pas prêts à l’entendre aujourd’hui, il faut que cela évolue. Il faudra également l’expliquer aux consommateurs. La question est de savoir comment ils vont réagir face à l’inflation, dans leur parcours d’achat et dans leurs achats. Lactel mettra tout en œuvre pour leur proposer en toute occasion des produits sains et responsables.

Propos recueillis par Jean Watin-Augouard

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