Bulletins de l'Ilec

L’électronique, un cas d’école - Numéro 355

01/08/2004

Par Hellen K. Omwando, Jaap Favier et Tim Van Tongeren, cabinet Forrester Research

Les achats traditionnels d’électronique grand public continuent d’augmenter, particulièrement pour les télévisions grand écran, les lecteurs de DVD et les caméras numériques. Les consommateurs européens ne se bousculent pas pour acheter ce type de produits en ligne. Avec 1,6 milliard d’euros en 2004, internet a assuré en Europe un modeste 3 % du total des ventes en électronique grand public, alors que sa part atteint 9 % aux Etats-Unis. Situation plutôt paradoxale : le Net est plus efficace qu’un point de vente pour inciter les consommateurs à acheter de l’électronique grand public hors ligne. Les Européens sont deux fois plus nombreux à chercher de tels produits en ligne en vue de les acquérir ensuite en magasin qu’à en acheter directement en ligne. Le nombre de particuliers qui achètent de l’électronique grand public sur la Toile a augmenté en valeur absolue, mais le pourcentage d’acheteurs stagne à 5 % , proportion identique à celle des cyberacheteurs d’épicerie. Dans le même temps, le nombre de recherches en ligne a augmenté, de 26 % des acheteurs à 31 % . Cela signifie que le taux de la conversion en achats a diminué de 16 % . Les consommateurs européens hésitent à acheter ces produits en ligne pour deux raisons principales : ils ne veulent pas livrer d’informations financières et ils sont circonspects devant la complexité du produit lui-même. Cependant, 72 % des acheteurs d’électronique en ligne visitent les sites des détaillants avant d’acheter. Et un tiers d’entre eux, deux fois plus que la moyenne des cyberconsommateurs tous produits confondus, se tournent vers les moteurs de comparaison, comme Kelkoo.com et Dooyoo. Le conseil en ligne émanant d’« experts » convertit les chercheurs en acheteurs. Alors que seulement 15 % des acheteurs ont consulté leurs proches avant d’arrêter leur décision d’achat d’un produit électronique en ligne, 30 % déclarent en avoir acheté un en se fondant sur le jugement d’un autre internaute – une proportion trois fois plus élevée que pour l’ensemble des produits vendus sur la Toile. Un cyberacheteur d’électronique sur deux consulte les forums de consommateurs ; 15 % s’y expriment. Pour les deux tiers des cyberacheteurs d’électronique, le critère de la marque prime la recherche systématique du prix le plus bas. Cependant, ces consommateurs sont plus souvent que les acheteurs en magasin des adeptes de la dernière marque à la mode, et moins souvent des fidèles d’une marque. En Europe, Philips est numéro un en magasin en termes d’usage et de notoriété, mais c’est très nettement Sony qui mène la danse en ligne. Ses adeptes présentent un profil proche de celui des pionniers de la cyberconsommation : ils sont plus jeunes que les fidèles de Philips, une majorité sont de sexe masculin, ils sont plus riches et mieux instruits. Plus les consommateurs ont d’expérience sur internet, plus ils profitent des conseils en ligne des autres consommateurs. Et plus ils sont jeunes, plus ils ont recours aux conseils des autres. Ces tendances sont plus ou moins accentuées en fonction des marques et de leur degré d’association avec la Toile. La moitié des cyberacheteurs de 16 à 34 ans qui ont une prédilection pour Sony ont consulté les autres clients, au lieu d’un tiers pour Philips. Les clés du succès Les consommateurs en ligne ne peuvent entendre, depuis leur ordinateur, le son de l’appareil stéréo qu’ils convoitent, ni juger de la véritable image d’un écran plasma. Pourtant, le nombre croissant des recherches de produits électroniques sur internet montre que les consommateurs ont besoin de compléter leur expérience d’achat hors ligne au moyen d’information en ligne. Cette attente appelle des efforts raisonnés de la part des offreurs. Les inquiétudes concernant la sécurité demeurent le principal frein à l’achat. Les détaillants renforceront la confiance nécessaire s’ils favorisent l’usage de systèmes sécurisés « 3D » pour les cartes de paiement et informent systématiquement les consommateurs des améliorations qu’ils apportent à leurs sites afin de garantir la confidentialité des données. Face aux attaques dont peuvent être victimes les sites de vente et leurs clients, au moyen de courriels déguisés ou de sites frauduleux, les distributeurs ont tout intérêt à solliciter le secours permanent d’opérateurs spécialistes tels que Cyveillance.com ou PassMark Software. Une aide visuelle est un atout. Un consommateur peut être séduit par un téléviseur à écran large en magasin, mais ne plus se rappeler de son aspect en rentrant chez lui. Ne va-t-il pas détoner avec la décoration de son salon ? Des vidéos de démonstration peuvent avantageusement être proposées en ligne, pour mettre en scène un produit dans différents décors. Une autre clé du succès peut être la présence en ligne d’un véritable interlocuteur, qui tient le rôle d’un employé de magasin réel. L’exemple en est donné par le site ChateauOnline, où le sommelier Jean-Michel Leduc donne des conseils sur les vins, envoie régulièrement des recommandations par courriel et informe des offres spéciales. La fourniture en ligne d’un appui financier peut s’avérer décisive, s’agissant de produits coûteux, comme une télévision plasma à 3 000 euros. Aux Etats-Unis, certains distributeurs acceptent les paiements par mensualités sans intérêt. Les consommateurs, ambassadeurs des sites Dans les produits informatiques, Apple et Dell ont lancé des magasins qui vendent une « expérience de l’appareil ». Les détaillants multicanaux d’électronique devraient faire de même, en utilisant les magasins pour des démonstrations de produits. Ils pourraient y installer des kiosques internet, pour attirer les chalands désireux de consulter sur place l’avis d’autres consommateurs avant de prendre une décision d’achat. Les détaillants en ligne peuvent s’imposer sur le marché européen, s’ils donnent plus de place aux jugements des consommateurs – comme le pratique Amazon qui leur donne la parole sur chaque produit – , en développant les moyens de comparer en ligne les caractéristiques de produits concurrents entre eux, et en cherchant à connaître – par l’envoi d’un courriel – ceux qui parmi leurs consommateurs se conduisent en ambassadeurs de leur site.

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