Bulletins de l'Ilec

A quoi servent les promotions ?

Offres spéciales : oui, mais... - Numéro 356

01/09/2004

Pour connaître la perception des consommateurs face à l’offre promotionnelle actuelle, et comprendre comment ils utilisent et apprécient les diverses offres, l’Ilec a confié au cabinet Synovate le soin de mener une enquête. Où l’on découvre que les consommateurs n’ont pas la religion des promotions.

« Si les prix étaient moins chers, les promotions ne seraient pas nécessaires. » La remarque est d’un consommateur ayant participé à l’étude réalisée par Synovate pour le compte de l’Ilec(1), consacrée à la perception des différents types de promotions. Dans un contexte marqué, depuis quelques années, par la multiplication des offres promotionnelles sur les produits de marques vendus en GSA – avec les NIP, nouveaux instruments de promotion, tels les lots virtuels, les bons de réduction électroniques et les tickets, ou les couplages d’offres –, les consommateurs seraient-ils devenus des experts ? Au cœur du débat : le prix. Les consommateurs seraient 70 % à « avoir le sentiment que, au cours des deux dernières années, les prix des produits que l’on peut trouver en grande surface ont beaucoup augmenté ». Et 87 % à mettre l’euro au banc des accusés. Vingt pour cent des personnes interrogées estiment que les enseignes de GMS ou les fabricants ont également leur part de responsabilité. Pragmatiques, ces consommateurs cherchent à compenser les hausses de prix par des économies réalisées grâce aux promotions. Sans pour autant que cela devienne une obsession : au nombre des critères de choix des enseignes, « les promotions annoncées dans les prospectus » sont à la quatrième place, derrière la proximité, le prix des produits et le choix des produits et des marques.

Au reste, près des deux tiers des consommateurs estiment que les promotions et les avantages liés aux cartes de fidélité ne compensent pas la hausse des prix entraînée par l’euro, et ne constituent pas une véritable baisse.

L’étude qualifie donc leur comportement d’« ambivalent » : globalement satisfaits, grâce à la possibilité de « faire des affaires » (61 % ), ils sont 43 % à avouer chercher les promotions lorsqu’ils font leurs courses mais 50 % à se sentir manipulés par les distributeurs. Ils cherchent à éviter les pièges, en particulier celui de la surconsommation : 63 % des consommateurs estiment que les promotions les poussent à acheter plus. L’enthousiasme reste néanmoins mitigé : seulement 13 % des consommateurs déclarent utiliser systématiquement les avantages auxquels ils ont droit grâce aux promotions ou aux cartes de fidélité, et 16 % pratiquent la chasse aux produits promotionnés comme un jeu. Sur l’ensemble des personnes interrogées, 25 % en achètent souvent (en particulier les détenteurs de cartes : 27 % ), 50 % de temps en temps, 20 % rarement et seulement 5 % n’en achètent jamais. Les deux premières catégories choisissent majoritairement les promotions qui donnent un avantage immédiat, qu’il s’agisse de réductions en caisse (79 % ), de lots physiques (69 % ) ou de produit en plus (66 % ). Viennent ensuite les lots virtuels, les bons de réduction différée, les points ou euros cumulés sur la carte de fidélité du magasin ou sur le ticket de caisse, et le cadeau offert avec le produit (entre 43 et 54 % ). Deux promotions sont fortement rejetées : le bon de remboursement différé (35 % ) et les jeux-concours (22 % ). Les cumuls de plusieurs avantages-produits, ou de plusieurs promotions différées effraient particulièrement les consommateurs, qui craignent d’être abusés. Plus de la moitié déclarent acheter volontiers une marque qui ne leur est pas habituelle si elle est en promotion.

Les deux dernières catégories de consommateurs associent trois raisons majeures au refus des promotions : ils préfèrent acheter leurs produits habituels, souhaitent préserver leur libre choix (du produit, de l’enseigne et du volume acheté) et ont du mal à comprendre le fonctionnement des promotions. De manière générale, 81 % des consommateurs souhaiteraient que les promotions soient moins nombreuses. Ils suggèrent notamment de limiter les offres « trop contraignantes » qui nécessitent d’acheter de grandes quantités (les lots physiques par quatre au prix de trois, par exemple) et celles qui apportent une faible réduction. Ils plébiscitent en revanche les animations-dégustations associées à des réductions ou à des prix de lancement. Si les consommateurs avaient le choix, ils préféreraient que les promotions soient remplacées par une réduction générale et permanente des prix de 5 à 10 % .

Les critiques du chaland s’exercent également vis-à-vis des cartes de fidélité, que les distributeurs associent souvent aux diverse formes de promotion : 71 % des personnes interrogées en détiennent une, et 25 % en possèdent même plusieurs. Les trois quarts des détenteurs jugent les avantages offerts par ces cartes « faciles à comprendre et intéressants », 70 % acceptent l’idée que les cartes contribuent à leur fidélité à une enseigne, 60 % qu’elles guident leur choix de produits. Cependant, 22 % ont le sentiment d’être incités à dépenser plus. Les deux tiers des chalands utilisent de temps en temps leur carte pour acheter des produits de plaisir et d’impulsion, mais, pour la majorité, elle ne permet pas de faire de réelles économies. Et ils mettent en question la légitimité, pour des distributeurs, d’agir en organismes de crédit, quand ils transforment les cartes de fidélité en cartes de paiement.

Si les consommateurs ne se posent spontanément pas la question du financement des offres promotionnelles au moment de leurs achats, ils l’attribuent aux distributeurs quand il s’agit de promotions liées aux cartes de fidélité, de réduction à utiliser ultérieurement dans l’enseigne et d’offres sur une courte période annoncée (« prix de la semaine »). Selon eux, les fabricants financeraient, pour leur part, les promotions mentionnées sur l’emballage, les offres liées au lancement d’un produit nouveau, et les offres de remboursement obtenues par envoi d’un courrier au distributeur. En termes d’image, les promotions sont plus favorables aux grandes enseignes qu’aux marques.

De manière générale, la multiplication des offres suscite chez le consommateur, selon l’étude, « une impression de banalisation, ainsi qu’une certaine perte de repères quant à la véritable valeur des produits de marques ». De surcroît, le cumul de plusieurs promotions nuit souvent à l’achat du produit : il rend la compréhension des promotions plus difficile, nécessite le calcul du bénéfice global, suscite de la méfiance à l’égard du produit, voire la crainte d’une arnaque. L’heure est donc, selon Synovate, « à une simplification et à une réduction du nombre des offres promotionnelles pour mieux les revaloriser ».

(1) Une phase qualitative, destinées à prendre en compte les pratiques et les perceptions individuelles,les éléments d’image et le discours social, s’est appuyée sur vingt-trois entretiens individuels approfondis, menés à Paris, Bordeaux et Dijon. Une seconde phase a quantifié les principaux enseignements de la première, sur la base d’un échantillon national représentatif de la population de 15 ans et plus, composé de 1 000 personnes, avec interview de celles participant aux achats courants pour le foyer.

Jean Watin-Augouard

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