Bulletins de l'Ilec

Vers une écologie de l’affiche - Numéro 362

01/04/2005

« Halte à la dépravation de nos entrées de ville. Que l’affiche entre à l’école. Du moins par le biais de l’enseignement. Montrons aux jeunes qu’elle peut être une œuvre d’art ! » Révolté par une laideur et une bêtise qu’aucune loi ne réprime, André Parinaud milite depuis 1968 pour encourager le rôle culturel des créateurs, lutter contre les dérapages environnementaux, et promouvoir « une véritable écologie de l’affiche » (1). « En 1968, nos objectifs consistaient à tenter de protéger nos rues de la pollution du regard. Nous avions décidé de choisir chaque mois la plus belle affiche et de condamner au pilori la plus laide. » Le grand prix de l’Affiche française vient de naître. Président-fondateur de l’Académie nationale des arts de la rue (Anar, sic), créée en 1976, André Parinaud aime à rappeler que « le véritable progrès est dans la rue, offert à tous, le reste est privilège et illusion ». L’ambition de l’Anar est d’introduire des objectifs culturels dans les secteurs de l’industrie, du commerce et de l’économie en général. Depuis trente-cinq ans, le grand prix de l’Affiche (2) couronne chaque année l’œuvre d’un créateur, à l’aune de valeurs esthétiques, civiques et écologiques. « Nous avons élaboré une grille de notation des arts de la rue qui permet, en moins d’une minute, de lire et d’apprécier une affiche tant en qualité publicitaire qu’en valeur culturelle, à partir de quatre critères : appréciation spontanée, valeur d’impact, valeur créatrice et adéquation au sujet. » Depuis deux ans, le jury délibère, avant notation, sur certaines affiches qui peuvent être écartées pour manque de respect du public. « Dans le climat actuel de contestation des marques et de la publicité, les créations audacieuses et poétiques peuvent apaiser la relation avec le public », recommande André Parinaud. L​‌’AFFICHE, UNE NOUVELLE DISCIPLINE A L​‌’ECOLE L’Anar entend prolonger sa mission en lançant un partenariat avec l’Education nationale. « Nous négocions actuellement avec le ministère afin que les professeurs de dessin enseignent l’art de l’affiche dans les écoles. La peinture est enseignée, pourquoi pas l’affiche. Les jeunes doivent apprendre à résister à la pollution publicitaire tout en sachant apprécier les affiches qui, par leur rigueur, leur source, leur référence et leur composition, sont des œuvres d’art. » Parallèlement, l’Anar souhaite tenir une fois par an une réunion avec les créateurs graphistes, les marques et l’Association des maires de France. « Si les élus sont davantage attentifs à la qualité des affiches placardées dans leur ville et ses abords, conseille André Parinaud, les marques ne pourront plus proposer n’importe quoi. Elles devront ajouter une dimension culturelle à la vente de leurs produits. L’affichage devrait être synonyme de spectacle esthétique et d’information. La démocratie n’existe pas dans ce domaine, il faut l’introduire. » (1) 1969-2004 – Trente-cinq ans d’affiches françaises, éditions Anar. (2) Deux autres concours, créés par l’Anar, ont primé près de deux cents villes françaises depuis vingt ans : « Lumière dans la ville » (mise en valeur du patrimoine urbain par l’éclairage) et « Choisissez vos couleurs » (restauration peinte des façades).

Jean Watin-Augouard

Nous utilisons des cookies pour vous garantir la meilleure expérience sur notre site. Si vous continuez à l'utiliser, nous considérerons que vous acceptez l'utilisation des cookies.