Bulletins de l'Ilec

Un écosystème à libérer - Numéro 484

05/11/2019

Trop de plateformes servant la logistique se juxtaposent sans s’interconnecter. Dans le transport des marchandises, la transition écologique par le numérique attend un feu vert politique. Entretien avec Stéphane Cren, responsable innovation chez GS1 France

Quel est l’apport des standards GS1 aux solutions d’optimisation de la chaîne logistique, sous l’aspect de la réduction de son empreinte environnementale ?

Stéphane Cren : Réduire l’impact environnemental de l’activité logistique est un grand enjeu dont nous mesurons l’urgence. Collectivement, nous avons deux défis à relever : la transformation numérique et la transition écologique. Ces deux injonctions sont concordantes à bien des égards : l’une désigne le but à atteindre, l’autre une partie des moyens à mobiliser. Et il ne s’agit pas d’une croyance creuse dans le tout technologique. Diffuser le numérique, c’est renforcer la connectivité des acteurs, donc leur potentiel de collaboration.

Mutualiser, synchroniser, partager des ressources, n’est possible que si les systèmes se parlent. Les standards GS1 hérités des années 1990, s’ils constituent un socle d’interopérabilité utile, ne suffiront pas. Nous appelons à forger une nouvelle génération de standards, afin d’orchestrer et d’accélérer cette transformation. En corriger le principal travers également : ces plateformes qui se juxtaposent plutôt que de s’interconnecter. Par exemple, nous savons que connecter les progiciels de gestion des transporteurs (TMS) avec tous ces systèmes de prise de rendez-vous nous allégerait d’un camion sur quatre sur les routes et de 15 % des coûts de transport.

Il nous faut construire cet écosystème numérique de la logistique en lieu et place du paysage fragmenté actuel. Pour cela, quatre ingrédients sont essentiels : des APIs (interfaces de programmation applicatives) standardisées pour quelques fonctions clés, un référentiel commun des lieux logistiques, des mécanismes de confiance et des identités numériques.

GS1 France est-il en relation avec toutes les solutions et plateformes d’intermédiation, « 3PL » ou « 4PL »1, aujourd’hui opérationnelles et tournées vers la mutualisation logistique et l’optimisation du transport de marchandises ?

S. C. : Bien des solutions pertinentes ont été défrichées. Nous savons mettre en place des hubs collaboratifs, partager des espaces de stockage, nous savons les avantages d’une conteneurisation de la marchandise, nous comprenons les atouts de la Blockchain pour créer des écosystèmes de confiance, et bien d’autres choses utiles. Beaucoup d’ingrédients sont disponibles. Il reste la mise en musique, la transformation à échelle réelle. C’est une autre affaire.

Jusqu’où les distributeurs et les prestataires logistiques devraient-ils (du point de vue de l’intérêt général) et pourraient-ils (du point de vue du droit) mutualiser leurs données sur les chargements et livraisons (communauté de données) ?

S. C. : Si le droit et l’intérêt général semblent si désalignés, c’est que nous avons un problème institutionnel à régler. Cette question est un terrain d’exploration, il faut la traiter à partir de l’intérêt général. Quel potentiel de réduction de CO2 et de NOx pouvons-nous atteindre par exemple dans une aire comme le Grand Paris en mutualisant les données de flux et les flux eux-mêmes ? Si la réponse est « beaucoup », il est évident que la société a tout intérêt à trouver les accommodements adéquats.

1. http://logistiqueconseil.org/Articles/Logistique/3PL-4PL.htm.

Propos recueillis par J. W.-A.

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