Tribunes

Lutte contre la précarité, l’affaire de tous

23/09/2021

Au cœur de la précarité des jeunes : l’accès souvent difficile à la formation et à l’emploi. Les entreprises accompagnent l’engagement de l’État non seulement dans le dispositif « Un jeune, un emploi », mais aussi par des actions philanthropiques. Une tribune de Sarah El Haïry, secrétaire d’État chargée de la Jeunesse et de l’Engagement.

Le pire de la crise sanitaire est, espérons-le, derrière nous. Mais ses dégâts, en matière sociale et économique, sont malheureusement là. Avec la crise induite par la pandémie de Covid-19, la précarité d’une partie de la jeunesse a été mise en avant dans la sphère publique, et d’une certaine manière accentuée. L’insertion professionnelle ou encore la recherche de jobs étudiants pour les jeunes se sont avérées plus complexes que prévu. Les offres d’emploi ont baissé de près de 40 % dans certains domaines, le gouvernement a dû, et a su, réagir. Je note également que les entreprises implantées sur le territoire ont globalement joué le jeu.

La précarité, porte d’entrée de la pauvreté

Tout d’abord, il faut bien circonscrire ce qu’on entend par précarité. La précarité, c’est une dynamique, c’est un glissement vers la pauvreté. C’est l’absence des sécurités nécessaires pour que les individus, et plus particulièrement les jeunes, puissent exprimer pleinement leurs droits. Dès 2018, le gouvernement a fait de la lutte contre la précarité une priorité, avec l’adoption d’une stratégie de prévention et de lutte contre la pauvreté. Soucieux d’agir pour les jeunes, désignés comme les « premières victimes » de la pauvreté. Le travail est conséquent, mais il reste beaucoup à construire pour notre jeunesse.

Il faut regarder ce phénomène en face, en bloc. On assiste à un rajeunissement de la population pauvre en France. En quarante ans, le taux de pauvreté a été divisé par deux pour les plus de 65 ans, tandis qu’il a été multiplié par deux pour les moins de 25 ans. L’un des indicateurs clés pour appréhender la précarité des jeunes, c’est le taux de chômage. Et si l’on veut combattre cette précarité, on doit répondre au défaut d’accès à la formation et à l’emploi des jeunes. Ce mouvement a déjà été amorcé par le gouvernement, et les acteurs économiques se mobilisent. Ils doivent néanmoins accélérer.

“Un jeune, une solution”

Pour gagner la lutte contre la précarité, l’État et les entreprises doivent avancer main dans la main. La clé, c’est de toucher 1,6 million de jeunes qui en 2017 n’étaient ni en emploi, ni en études, ni en formation, les “NEET” [1]. Depuis le début de la crise sanitaire, le gouvernement a adopté des mesures pour lutter contre la précarité des jeunes. Au-delà de l’élargissement du nombre de bénéficiaires de la Garantie jeunes à plus de deux cent mille en 2021, il y a tout le volet « jeunesse » du plan de relance, articulé autour du dispositif « 1 jeune, 1 solution » porté conjointement par Jean-Michel Blanquer et Élisabeth Borne.

L’action du gouvernement s’articule autour de trois axes majeurs : faciliter l’entrée des jeunes dans la vie professionnelle ; orienter et former les jeunes vers les secteurs et métiers d’avenir ; accompagner les jeunes éloignés de l’emploi en construisant des parcours d’insertion sur mesure. Aujourd’hui, les résultats commencent à être visibles. Entre août et novembre 2020, plus d’un million de recrutements ont déjà été réalisés. Un nombre analogue à 2019 malgré la crise. Quatre cent quarante mille contrats en alternance ont été également signés en 2020, c’est quatre-vingt-dix mille de plus qu’en 2019. Je pourrais aussi citer la création de vingt mille jobs étudiants depuis novembre, le doublement des aides d’urgence versées par les Crous, les repas à 1 euro, les petits déjeuners gratuits à l’école dans les territoires prioritaires ou encore l’instauration d’une aide exceptionnelle pour les travailleurs précaires.

Cap sur la philanthropie locale

Ce sur quoi je veux insister, c’est que toutes ces mesures, aussi fortes soient-elles, n’auront pas l’impact que l’on espère si les grandes entreprises ne s’inscrivent pas dans cette dynamique. Cela vaut également pour les entreprises de produits de grande consommation (PGC), qui ont un grand rôle à jouer pour lutter contre la précarité des jeunes. Par ailleurs, je souligne que la majorité des entreprises françaises de la grande consommation, durant la crise provoquée par la pandémie de Covid-19, ont mis en place des actions ou des campagnes qui soutenaient les jeunes, et plus particulièrement les étudiants rencontrant des difficultés financières. Je pense à la distribution de bons d’achat, aux collectes organisées en faveur des Banques alimentaires ou encore aux dons que les industriels et les grands distributeurs ont mis en place.

Mais il ne s’agit malheureusement là que de mesures ponctuelles. Le nerf de la guerre, ce sont les alliances territoriales, notamment avec les associations et en lien avec les collectivités. Pendant la crise, à l’échelle locale, de nombreux magasins et leurs fournisseurs se sont mobilisés en approvisionnant notamment en produits de première nécessité des associations étudiantes. Cette philanthropie locale, portée politiquement par les réseaux coopératifs vers les entreprises mères des groupes, est concrète. Elle marche. Il nous paraît même souhaitable de décloisonner le cadre normatif autour d’elle, pour la pérenniser et faciliter l’envie de s’engager. Ce sont de bonnes pratiques, mais si l’on souhaite lutter contre la précarité d’une partie de notre jeunesse de manière durable, il faut que les entreprises se mobilisent en matière d’emploi de jeunes. Certaines entreprises se sont saisies du volet « jeunesse » du plan de relance pour construire de vraies politiques d’emploi des jeunes. La multiplication des initiatives par les grandes entreprises françaises, en lien avec les actions menées par le gouvernement, aurait un réel impact sur la précarité d’une partie de la jeunesse en France. Nous devons plus que jamais nous engager pour notre jeunesse. Et cet engagement, c’est l’affaire de tous.

[1] Pour “Neither in employment nor in education or training”.

Sarah El Haïry

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