Bulletins de l'Ilec

Éditorial

Info conso, esprit public - Numéro 444

01/08/2014

Et si la seule information dont le public attendrait vraiment qu’elle soit sérieuse était l’« information consommateurs  », tandis que les rubriques hier nobles des journaux ne susciteraient plus que son scepticisme, bien ancré à une crise du politique sans remède  ?

Les ressources sont toujours plus nombreuses à disposition des consommateurs pour s’informer, et des metteurs en marché pour leur répondre ou aller au devant de leur curiosité. Mais si la qualité de l’information sur les produits et les services fait l’objet de débats légitimes, l’« info conso  » comme fait social reste à décrire1  : le besoin de s’informer est-il stable, s’affirme-t-il autant en tous secteurs, avec toujours des motivations du même ordre  ? La soif d’information est-elle fonction du niveau de dépense  ? Ou de la fréquence d’achat, comme la sensibilité au prix ou au gaspillage  ? Serait-on d’autant moins porté à s’interroger sur la chose et le prix que la dépense est contrainte et médiate  ?

Plusieurs des contributions à ce Bulletin suggèrent qu’il faut chercher le ressort de la curiosité dans la nature des biens et services, mais aussi dans la dimension subjective de leur appropriation. C’est sur cette dimension qu’il esquisse la réflexion, sans perdre de vue que l’information reste un domaine d’intervention réglementaire et d’obligations légales, comme le rappellent le BEUC et l’UFC en des termes qu’on pourra trouver sévères pour l’industrie. A contrario de la dimension identitaire de la consommation, une information de référence, verticale, serait attendue  ; là où la demande d’assurance est la plus forte, comme dans l’alimentaire, il serait demandé à la réglementation de s’étendre aussi loin que porte l’information, et que soit dissipée toute possibilité d’interférence  : ni personnalisation par l’émetteur, ni complexité pour le récepteur…

L’exigence d’une information objective, dont les gens de presse savent combien elle peut être chimérique, aurait ainsi migré de la grande presse vers le panier de la ménagère. Mais de ce consumérisme qui ne connaît pas l’air de la consommation identitaire, l’audience est concurrencée par la conversation multilatérale où s’exprime le « jugement des pairs  », tandis qu’entre les deux s’étendent ou se contractent les territoires du marketing. Objectivité ou pluralisme  : ces équivoques sont vieilles comme la Gazette de M. Renaudot.

1. Il ne semble pas exister d’étude multisectorielle permettant un panorama de la question (merci au magazine de l’INC 60 millions pour son écoute sur le sujet).

 

François Ehrard

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