Entretiens

Consommation des ménages

Énergie, poids variable

14/06/2022

Une épargne élevée, mais, vue du crédit consommation, une consommation qui reste dynamique. Sauf côté énergie ? Les anticipations de sobriété, à la maison ou au volant, montrent qu’il y a chez les ménages une certaine élasticité de la demande. Entretien avec Mathieu Escarpit, directeur marketing de Cofidis France.

En septembre dernier votre Baromètre du pouvoir d’achat montrait que 50 % des Français considéraient que leur pouvoir d’achat avait diminué au cours des dix dernières années. ; vous attendez-vous à une accentuation brutale de la tendance dans votre prochaine vague d’enquête ?

Mathieu Escarpit : Dans les conditions actuelles, il est difficile d’imaginer une amélioration de la situation financière des Français au cours des prochains mois. D’ailleurs, dans notre dernière enquête (qui portait sur les stratégies financières mises en place par les Français pour faire face à l’inflation), 48 % d’entre eux déclaraient être pessimistes quant à l’évolution de leur situation financière dans l’année à venir. Chiffre plus fort encore, 81% des Français pensent qu’ils vont devoir se restreindre sur leurs dépenses essentielles.

Quelle part occupe aujourd’hui l’énergie dans la perception du coût de la vie ?

M. E. : Depuis le début de la guerre en Ukraine et de l’inflation que l’on connaît, nous n’avons pas récolté de données précises sur la proportion que tiennent les différents postes énergie dans le budget des Français, mais ce qui ressort de notre dernière enquête sur leurs stratégies financières face à l’inflation, c’est que pour faire face à la baisse de leur pouvoir d’achat 25 % des Français prévoient de limiter leur consommation de chauffage, et 22 % de limiter l’usage de leur véhicule et des transports, au cours des douze prochains mois.

Le renchérissement du coût de l’énergie a-t-il affecté la demande de crédit consommation ?

M. E. : Nous n’avons pas d’éléments qui permettent d’effectuer un lien de corrélation entre la hausse du coût de l’énergie et la hausse des demandes de crédit. En revanche, depuis le début de l’année on observe effectivement une hausse des demandes de crédit à la consommation, comme l’illustrent les derniers chiffres de l’ASF publiés en mars 2022 : la production des nouveaux crédits à la consommation a augmenté de 7,7 % entre mars 2021 et mars 2022, et elle est en augmentation de 17,2 % par rapport à mars 2019.

Le coût de l’énergie vous conduit-il à reconsidérer vos critères d’acceptation des demandes ou à refuser plus de demandes de crédit qu’il y a un an ?

M. E. : Les hausses du coût de l’énergie n’ont en aucun cas modifié nos critères d’octroi de crédit. Chez Cofidis, quel que soit le profil de l’emprunteur, nous faisons preuve de responsabilité : ainsi, nous n’acceptons que deux dossiers sur dix, après une étude approfondie des dossiers et vérification des justificatifs reçus.

Crédit auto qui ne connaît pas la crise

Dans les demandes de crédit, est-ce qu’a grandi ces derniers mois la part de celles qui visent à compenser des difficultés à boucler les fins de mois ? Et la crise a-t-elle infléchi les parts respectives des divers domaines de dépense (travaux, équipement domestique, automobile, etc.) ?

M. E. : Nous ne possédons pas de données permettant de connaître l’affectation des crédits de nos clients, mais d’après les chiffres de l’ASF publiés en mars dernier, les crédits liés aux financements de biens d’équipement et ceux destinés à l’amélioration de l’habitat sont en hausse : de 3,8 % entre mars 2021 et mars 2022. Les crédits affectés à l’achat de véhicules neufs progressent eux aussi, de 9,9 % par rapport à mars 2019, de même que ceux consacrés aux véhicules d’occasion (+ 19,6 % ). Cependant, entre mars 2021 et mars 2022, le montant moyen d’emprunt par les consommateurs est resté stable, que ce soit pour le crédit renouvelable ou pour le crédit amortissable.

Voyez-vous un risque de déconsommation et de montée de l’épargne de précaution ?

M. E. : Malgré les crises, les Français épargnent de plus en plus : le montant de leur épargne est ainsi passé récemment de 113 milliards d’euros fin 2020 à 175 milliards fin 2021, selon les chiffres de la Banque de France, même si aujourd’hui la consommation des ménages tend à se redresser légèrement au deuxième trimestre, d’après les données publiées début mai par l’Insee…

Propos recueillis par François Ehrard

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