Protocoles, codes de conduite, engagements volontaires

Charte

Engagements des fournisseurs de produits agricoles et alimentaires et des enseignes de la grande distribution dans le contexte de guerre en Ukraine

31/03/2022

Le document adopté le 31 mars 2022 a été signé, à un niveau plus ou moins élevé s’agissant des enseignes de la distribution, par E.Leclerc, Groupe Carrefour, Intermarché-Netto, Système U, Groupe Casino, Auchan, Lidl, Aldi, Cora. Et côté industriels par l’Ania, la Coopération agricole, l’Adepale, la Feef, la Fédération des industries avicoles, Culture Viande. Et par l’Ilec, mais assorti de cette réserve : “L’Ilec souscrit aux engagements de la charte, mais regrette qu’ils ne s’appliquent pas expressément aux catégories de produits de première nécessité non alimentaires pareillement affectées depuis des mois par les diverses sources d’augmentation des coûts.”*

« La crise ukrainienne a amplifié la situation d’inflation généralisée, eu égard aux impacts immédiats et importants de la guerre sur les filières agricoles françaises à l’amont comme à l’aval :

  • l’augmentation en cours des prix de l’énergie (gaz et électricité) dans les exploitations, les entreprises agro-alimentaires, comme les enseignes de la grande distribution ;
  • l’augmentation du prix des engrais, dont certains sont importés de Russie ou Biélorussie ;
  • l’augmentation des cours mondiaux des céréales, dont 30 % des exportations mondiales sont assurées par l’Ukraine et la Russie ; ou des oléagineux, notamment du tournesol, dont 70 % de la consommation européenne est assurée par l’Ukraine ;
  • l’augmentation du coût de l’alimentation animale (en particulier porcs et volaille), dont l’Ukraine est un important producteur, et qui représente jusqu’à 60 % du coût des intrants ;
  • l’augmentation généralisée des intrants industriels (transports et emballages notamment) et la désorganisation des chaînes d’approvisionnement ;
  • la raréfaction de certains produits, en provenance d’Ukraine ou de Russie.

Ainsi, au-delà des problématiques liées à l’approvisionnement en matières premières agricoles et industrielles, c’est bien le renchérissement de l’ensemble des intrants qui affecte les acteurs des filières agricoles françaises, comme en témoigne les données objectives de situations de marchés consultables auprès de France AgriMer.

Cette guerre intervient alors que les négociations commerciales, qui se sont achevées le 1er mars 2022 se sont déroulées dans le cadre d’une hausse significative de l’ensemble des intrants agricoles et non agricoles.

Les pouvoirs publics prennent leurs responsabilités en apportant, dans le cadre d’un plan de résilience présenté le 16 mars 2022, des réponses concrètes pour amortir ces impacts : aides pour les indus- triels directement touchés par les augmentations des coûts de l’énergie, plan de soutien pour aider les filières animales à absorber l’augmentation des coûts de l’alimentation animale (en complément d’un plan spécifique pour la filière porcine), baisse de 18 cts € pendant 4 mois des carburants à partir du 1er avril (y compris GNR).

En complément de ces mesures, les obligations légales encadrant les relations commerciales doivent se traduire concrètement dans les contrats et leur exécution, notamment les clauses de renégociation et d’indexation. Les acteurs économiques ont vocation à faire, en responsabilité, leurs meilleurs efforts pour que, par ailleurs, les exigences de transparence et de loyauté qui fondent ce cadre légal soient respectées et effectives tout au long de la chaîne économique. Ces acteurs ont également un rôle essentiel à jouer dans la préservation de la souveraineté agroalimentaire, et dans ces circonstances exceptionnelles, la solidarité entre tous les acteurs de la filière agricole et agroalimentaire, doit prévaloir.

Aussi, les différentes organisations professionnelles représentatives des fournisseurs de produits agricoles et alimentaires comme des enseignes de la grande distribution, réunies le 18 mars 2022 autour des ministères de l’Économie, des Finances et de la Relance et de l’Agriculture et de l’Alimentation, ont pris à la suite de cette réunion plusieurs engagements à titre exceptionnel et temporaire.

Même si les causes sont différentes, la présente charte s’inscrit dans la même démarche que celle exprimée dans la recommandation 20-01 de la Commission d’examen des pratiques commerciales, laquelle, face à la crise sanitaire liée à la Covid-19, avait préconisé des recommandations en matière de renégociation des contrats et de pénalités logistiques, qui s’appliqueront à l’épidémie d’Influenza aviaire, qui sévit actuellement dans l’Ouest de la France et qui aura des impacts sur l’offre et les prix de la volaille et des œufs, ou à tout autre événement exceptionnel, climatique par exemple.

Les engagements sont ainsi les suivants :

De la part des enseignes de distribution

Les enseignes de la grande distribution acceptent d’étudier attentivement les demandes de renégociation des contrats qui leur seront soumis conformément à l’article L441-8 du code de commerce par les entreprises significativement touchées par les conséquences de la guerre en Ukraine et de l’avian influenza, du fait de modifications de leurs approvisionnements, du renchérissement des matières premières, agricoles et industrielles (emballages), qu’ils utilisent, de l’augmentation de leurs coûts énergétiques ou de transport.

Ces renégociations pourront s’inscrire, pour les entreprises concernées, dans le cadre des mécanismes contractuels obligatoires instaurés par la loi Égalim2 du 18 octobre 2021, notamment dans le cadre des articles L. 441-8 et L. 443-8 du Code de commerce.

Une attention particulière sera apportée à l’adaptation des contrats, y compris lorsque les critères de déclenchement des différents outils prévus par la loi pour adapter le prix convenu à l’évolution des conditions économiques ne seront pas nécessairement réunies ou compatibles avec la cinétique de la crise actuelle :

  • Les dates de déclenchement des clauses de révision automatique des prix et notamment leur périodicité pourront être adaptées. Il pourra être envisagé de déclencher leur mise en œuvre sans délai.
  • En tout état de cause, ces renégociations se dérouleront avec la diligence requise, et dans le délai maximum d’un mois à compter de la date de réception de la demande prévu par la loi [1].

Lorsque les clauses de révision automatique et de renégociation ne sont pas applicables ou que leurs conditions ne sont pas strictement remplies, les enseignes de distribution acceptent de rentrer en renégociation, dans le respect des règles relevant tant du droit commun des contrats (exemple de l’article 1195 du code civil) que des pratiques restrictives de concurrence (article L 442-1 du code de commerce sur le déséquilibre significatif dans les droits et les obligations des parties), pour prendre en compte les surcoûts dus à la guerre en Ukraine ou à l’épidémie d’avian influenza.

Les contrats sous marques de distributeurs (MDD) en cours d’exécution ou à venir tiendront compte du nouveau contexte, notamment l’augmentation des coûts des matières premières, des emballages, de l’énergie et du transport.

Au-delà du strict respect de la loi Égalim2, les enseignes s’engagent à tenir compte de ce contexte exceptionnel et à ne pas appliquer les pénalités logistiques contractuelles dès lors que les fournisseurs de produits agricoles et alimentaires fortement impactés par les conséquences de la guerre en Ukraine ou de l’avian influenza (approvisionnement, renchérissement des ingrédients impliquant des changements de recettes…) alerteront dans les meilleurs délais, leurs partenaires distributeurs des difficultés qu’ils rencontrent en raison de ces circonstances, en justifiant précisément leur demande.

De la part des fournisseurs

En appui des demandes de renégociations, les fournisseurs s’engagent à apporter, en transparence et de bonne foi, tout justificatif dont ils disposent sur la réalité des impacts directs et indirects de la guerre ou de l’avian influenza, sur leur activité et la temporalité associée (il sera tenu compte des stocks et des couvertures financières). Ils s’engagent à ce titre, au niveau individuel, à apporter toute information sur les difficultés liées à l’approvisionnement et le cas échéant, à mettre en place, au ni- veau de chaque entreprise, des mécanismes d’allocation des produits, en cas de disponibilité limitée, garantissant un traitement équitable des enseignes.

À faire leurs meilleurs efforts pour livrer les marchandises aux conditions convenues (en considérant les besoins exposés par le transformateur dans le cadre de la renégociation et ses difficultés liées au contexte, notamment d’approvisionnement ou de transport…), et à assurer sans délai une information anticipée et transparente sur les éventuelles difficultés à honorer les commandes en mettant en place un mécanisme d’alerte adapté.

Ainsi qu’à mettre en œuvre des dispositions qui soient réversibles en cas de retournement des marchés.

Ces engagements seront mis en œuvre dans le respect des règles de droit commun des contrats telles que la bonne foi et la loyauté (article 1104 du Code civil), comme dans celles définies par le titre IV du livre IV du Code de commerce.

La médiation des relations commerciales agricoles comme celle des entreprises se tiennent à la disposition des acteurs pour faciliter ces renégociations [2]. »

* Voir l’intervention de Richardr Panquiault sur BFMTV le 1er avril.
(1) Par application de l’article L. 441-8 du Code de commerce.
(2) Conformément au cinquième alinéa du L. 441-8 du Code de commerce.

Comité interministériel de suivi des négociations

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