Communiqué de presse
Soutien massif du Parlement européen à la DGCCRF et aux parlementaires français contre les pratiques déloyales des alliances européennes de distributeurs
16/07/2025
Le 15 juillet, la commission Agriculture du Parlement européen a adopté à un quasi-unanimité,44 voix contre 1, le rapport de Stefano Bonaccini (socialiste, italien). Ce rapport portait sur la proposition de règlement de coordination transfrontalière des autorités de contrôle des pratiques déloyales.
Pour bien saisir la portée de ce vote, il faut rappeler le contexte. La France, puissance agricole et agroalimentaire, souhaite maintenir une production sur son territoire de produits sains, sûrs et durables.
L’équilibre de ce système est assuré par des dispositions du Code du commerce français qui visent à garantir des négociations justes et une création de valeur bénéfique à l’ensemble des acteurs de la chaîne, producteur, transformateur, distributeur et consommateur.
Or certains distributeurs ont tenté de contourner ce corpus juridique en créant des alliances de distributeurs au niveau européen. La DGCCRF, en conformité avec l’article 9 du règlement Rome 1, considère que les alliances de distributeurs peuvent se baser où elles veulent, choisir le droit qu’elles veulent, mais doivent respecter les dispositions impératives dérogatoires nationales (aussi appelées lois de police).
Elle a donc prononcé six sanctions depuis 2019 contre ces alliances : Eurelec (Leclerc-Rewe, 117 millions en 2019), Eurelec (6 millions en 2020), Intermarché-Agecore (151 millions en 2021), Intermarché-Agecore (19,2 M€ en 2022), Eurelec (38 M€ en 2024), Eureca (Carrefour, 10 M€ en 2024).
Les parlementaires français inquiets de la multiplication des alliances européennes malgré les actions de la DGCCRF ont de leur côté renforcé les lois et multiplié les rapports pour condamner les pratiques déloyales des alliances et leur contournement des lois françaises protégeant les fournisseurs :
- Rapport du Sénat de CatherineLoisier et DanielGremillet de novembre 2024 (titre C, Les centrales internationales poursuivent leurs contournements malgré la loi Descrozaille).
- Rapport de l’Assemblée nationale de Julien Dive, Mathilde Hignet, Harold Huwart et Richard Ramos (titre B- Lutter contre les stratégies de contournement en France et en Europe).
- Intervention de Stéphane Travert, député et ancien ministre (1 : 45 de la vidéo).
Le seul recours du lobby de la grande distribution restait donc le niveau européen. Son association européenne a porté plainte contre la loi Descrozaille, plainte restée sans réponse de la Commission européenne. Les distributeurs ont ensuite orchestré une immense campagne de lobbying pour convaincre les parlementaires que l’application extraterritoriale de lois de police était incompatible avec le marché unique.
C’était méconnaitre les dispositions de la directive de 2019 selon laquelle, selon l’article 3 paragraphe 4, les lois traitant des pratiques déloyales sont des lois de police, c’est-à-dire qu’elles s’appliquent de manière extraterritoriale.
Leur dernière idée était donc de limiter la coopération entre autorités de contrôle aux pratiques déloyales harmonisées par la directive afin de rendre plus difficile le contrôle transfrontalier des pratiques déloyales non-harmonisées. Une victoire lors du vote d’hier aurait ainsi permis de protéger les alliances européennes de distributeurs basées dans les pays où la législation est la moins protectrice des fournisseurs.
« Je salue le vote des parlementaires européens et le travail du rapporteur Stefano Bonaccini. Le marché intérieur est essentiel pour les fabricants de marques, les distributeurs et les consommateurs. Mais la concurrence doit y être saine. Elle doit être basée sur le mérite, l’innovation, la qualité des produits et des entreprises, et non bénéficier à l’opérateur qui aura trouvé le meilleur subterfuge juridique pour imposer les pires pratiques déloyales à ses partenaires commerciaux. Les alliances européennes de distributeurs se multiplient et représentent 90 % du marché français aujourd’hui. Ce vote est une étape, mais une révision de la directive pratiques déloyales paraît nécessaire pour encadrer les pratiques déloyales transfrontalières de ces alliances » (Nicolas Facon, PDG de l’Ilec).